La pilule antitabac
est arrivée
Sur le front de l'antitabagisme, c'est une
petite révolution: un médicament, le Zyban, délivré sur ordonnance
aux fumeurs repentis, sera disponible aujourd'hui dans toutes les
pharmacies. Le Zyban fait partie des antidépresseurs et les
chercheurs ont constaté que, chez certains fumeurs, la nicotine
agissait comme antidépresseur. Cette nouvelle pilule antitabac
connaît un énorme succès aux Etats-Unis, où elle est utilisée depuis
deux ans. Selon les études, le taux de succès serait de 30 % après
trois mois, soit le double de celui atteint avec les substituts
nicotiniques. La boîte de 60 comprimés de Zyban, suffisante pour un
traitement de sept à neuf semaines, coûte 557 F (84,91 euros), non
remboursés par la Sécurité sociale. L'Agence française des produits
de santé (Afssaps) met en garde contre «un risque de survenue de
convulsions et un risque potentiel d'abus ou de dépendance rare mais
non exceptionnel». Elle souligne plusieurs contre-indications et
rappelle que le Zyban peut, comme tout médicament, entraîner des
effets secondaires. L'Afssaps recommande «de commencer le traitement
avant l'arrêt effectif du tabac, ce dernier devant être effectué de
préférence au cours de la deuxième semaine de traitement. En
l'absence d'efficacité à la septième semaine, il n'y a pas lieu de
poursuivre le traitement».
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eut-on prévenir ou au moins retarder l'apparition de la
maladie d'Alzheimer? Les chercheurs veulent y croire: pour la
première fois, un vaccin va être testé chez environ 400 malades
souffrant de démence sénile précoce. Une approche thérapeutique qui,
pour la première fois, cherche à agir directement sur les causes de
la maladie et pas seulement sur ses symptômes. La campagne
internationale d'essais devrait démarrer avant la fin du mois aux
Etats-Unis et dans plusieurs pays d'Europe, dont l'Allemagne, le
Royaume-Uni, l'Espagne, la Suisse et la France, où plus d'une
centaine de patients ont été sélectionnés. Objectifs? Confirmer la
bonne tolérance de ce vaccin développé par les laboratoires Elan et
Wyeth; voir s'il induit la formation d'anticorps; enfin - même si ce
n'est pas le principal but à ce stade -, évaluer s'il améliore les
signes d'une maladie pas trop évoluée.
«L'idée est d'immuniser contre des protéines (nommées
bêta-amyloïdes, ndlr) pas très anormales en elles-mêmes, mais qui
s'accumulent en plaques au cours de la maladie, explique le Pr
Jean-Marc Orgogozo (CHU de Bordeaux), l'un des investigateurs. Si
les protéines sont neutralisées par des anticorps, cela devrait
empêcher la formation des plaques.» Ces plaques cérébrales,
dites amyloïdes, sont, au côté des destructions de neurones, l'une
des signatures de la maladie d'Alzheimer. Une maladie redoutable et
de plus en plus fréquente, qui touche actuellement 450 000 personnes
en France, pour la plupart âgées de plus de 65 ans.
Souris. Dans un premier temps, le vaccin, appelé AN-1792,
a été testé par des équipes américaines chez des souris
préalablement rendues sensibles à la maladie par des manipulations
génétiques. Dans plusieurs expériences (publiées l'an dernier dans
la prestigieuse revue Nature), les injections ont fait
régresser les plaques chez les animaux ayant déjà déclaré la maladie
ou prévenu leur apparition lorsqu'elles étaient réalisées avant les
premiers symptômes. Mieux, le comportement de souris malades s'est
trouvé amélioré, notamment leur mémoire spatiale.
Fort de ces résultats, le laboratoire a conduit les premiers
essais chez l'homme, chez une centaine de volontaires non malades:
le vaccin a été bien toléré et a induit la formation d'anticorps
contre la substance amyloïde dans environ un quart des cas.
La nouvelle phase de l'étude, qui va débuter ces jours-ci,
concerne, cette fois, des personnes qui ont déjà déclaré la maladie
et présentent une atteinte «minime à modérée». La France est l'un
des plus gros investigateurs, avec une dizaine de sites dont Paris,
Bordeaux, Lille, Toulouse et Montpellier. «Les malades recevront
trois ou quatre injections intramusculaires sur une durée de six
mois. Ensuite, la poursuite du traitement dépendra de leur
réponse», précise-t-on au laboratoire Wyeth, qui gère l'étude en
Europe. Examens cliniques, prélèvements sanguins et de liquide
céphalo-rachidien pour doser les anticorps, IRM (imagerie par
résonance magnétique) pour juger de l'évolution des plaques... Les
volontaires seront examinés régulièrement, pendant douze à quinze
mois. Quant aux résultats, ils ne seront pas connus avant deux à
trois ans. Les spécialistes ont envie d'y croire. «Lors des
précédents essais de médicaments, nous savions d'emblée que l'effet
ne serait que partiel. Là, on peut espérer un effet curatif»,
note le Pr Orgogozo. Qui tempère toutefois son enthousiasme...
«Attention, poursuit-il. D'abord, il faut se souvenir que
la souris n'est qu'un modèle, dont on n'est pas sûr qu'il soit
fiable. Ensuite, il n'est pas certain que les plaques amyloïdes
soient la bonne cible, car on ne connaît pas très bien la relation
entre leur présence et les symptômes. Enfin, il faut confirmer que
le vaccin n'est pas toxique.»
Des réserves partagées par le Pr Françoise Forette (hôpital Broca
à Paris), qui coordonne l'étude en France. «Il ne faut pas donner
de faux espoirs aux malades, nous ne sommes sûrs de rien»,
martèle-t-elle. Et d'ajouter: «Même si le vaccin agit sur les
plaques, il ne va pas faire repousser les neurones.» Autrement
dit, il risque, de toute façon, d'être inefficace lorsque la maladie
est très évoluée.
«Aventure». Malgré toutes ces incertitudes et limites, les
investigateurs ont fait face à un afflux de volontaires et tous les
candidats ont déjà été recrutés. «C'est maintenant une aventure
que nous allons partager avec nos patients», synthétise
Françoise Forette. Si elle finit bien, le vaccin pourra alors être
testé chez des personnes présentant un déficit très léger, voire
préventivement.
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