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Respect de la vie privée...
  La Cour de cassation a rendu pour la première
fois un arrêt catégorique sur la surveillance
des e-mails au bureau : l'employeur n'a pas
le droit de les contrôler sans l'autorisation
du salarié. Une jurisprudence qui ne donne
pas pour autant tous les droits aux employés.

Un e-mail est une correspondance privée, même échangée sur le lieu de travail, et même lorsque son usage à des fins personnelles est interdit au bureau.

Le mail n'a pas valeur de preuve
La Cour de cassation l'a affirmé catégoriquement dans son arrêt rendu le mardi 2 octobre, dans le cadre d'un procès qui opposait un ingénieur licencié à la société Nikon.
Le salarié exerçait une activité parallèle à son travail et utilisait les outils informatiques de son entreprise pour cette occupation.
L'ingénieur paraît donc fautif à l'égard de son contrat de travail, mais les juges n'apprécient pas les preuves apportées par l'entreprise : un extrait des courriers électroniques du salarié.
Ils précisent que "le salarié a droit, même au temps et lieu de travail, au respect de l'intimité de sa vie privée (...) l'employeur ne peut, dès lors, sans violation de cette liberté fondamentale, prendre connaissance des messages personnels émis par le salarié et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à sa disposition pour son travail et ceci même au cas où l'employeur aurait interdit une utilisation non professionnelle de l'ordinateur".

Des commentaires erronés
Un jugement important car "la Cour de cassation fixe le droit", explique Pascal Alix, avocat à la Cour.
Cet arrêt fera donc jurisprudence et condamnera les tentatives de contrôle des e-mails au bureau... sans l'autorisation des employés.
"Ce dernier point semble être oublié dans la plupart des commentaires sur la décision", précise Pascal Alix. "L'arrêt a été interprété comme s'il donnait le droit aux salariés d'utiliser les outils du bureau à leurs fins personnelles et que l'employeur était désormais privé de toute possibilité de contrôle. Or la Cour de Cassation condamne seulement les méthodes utilisées par l'entreprise, donc l'ouverture d'un e-mail à l'insu du salarié. Le fait que la police ne puisse pas procéder à la fouille d'un véhicule pour chercher des explosifs, par exemple, ne signifie pas qu'on a le droit de transporter des explosifs !".
Selon l'avocat, le principe de loyauté -qui oblige l'employeur à prévenir le salarié- demeure. Même si la Cour a donné raison à l'ingénieur licencié, elle n'annule pas le droit de contrôle des entreprises, mais le rend très difficile. Cependant, la jurisprudence n'est pas claire sur les situations pénales où l'entreprise peut être accusée de complicité. L'arrêt du 2 Octobre -rendu par la chambre sociale- concerne le droit du travail, mais la législation risque fort d'être différente dans le cadre d'une affaire criminelle. Les récents débats autour de l'accès aux e-mails privés dans le cadre d'une enquête terroriste peuvent bouleverser les règles.

Burçin Gerçek


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