Des mouches rendues temporairement homosexuelles par manipulation génétique ATTENTION - EMBARGO le 16/09/02 à 21H00 GMT/// par Pascal BAROLLIER WASHINGTON, 16 sept (AFP) - Des chercheurs américains ont réussi à modifier les préférences sexuelles de la Drosophile, ou mouche du vinaigre, la rendant temporairement homosexuelle, par une action sur certains neurones, selon des travaux à paraître mardi aux Etats-Unis. Les chercheurs, par manipulations génétiques, ont introduit un gène mutant, sensible à la température, au sein d'un groupe particulier de neurones de la Drosophile. Ce gène joue un rôle dans les secrétions d'un transmetteur chimique. "Le gène mutant a interrompu les communications nerveuses dans ces neurones spécifiques quand les mouches mâles ont été placées sous des températures plus chaudes. Elles ont soudainement commencé à s'intéresser aux autres mâles", a expliqué le professeur Toshihiro Kitamoto, qui a conduit l'étude publiée dans les Comptes rendus de l'Académie nationale des sciences (PNAS) américaine. Pour l'expérience, l'allèle d'un gène appelé "shibire" a été modifié pour être sensible à la température et perturber les transmissions synaptiques entre neurones. A partir de 30°C, les mouches mâles modifiées ont commencé à se désintéresser des mouches femelles pour tourner leur attention vers d'autres mâles, répondant même aux avances sexuelles de mâles par les mêmes avances, selon l'étude. Replacées dans un milieu plus frais, les mouches ont repris leur comportement sexuel habituel, selon la recherche. Ses résultats tendent à montrer que les rapports entre mâles sont supprimés par l'actions de neurones dont le rôle pourrait être de détecter ou d'interpréter des signaux d'hormones anti-aphrodisiaques, a encore expliqué le professeur Kitamoto, du service de neurosciences du Centre de recherche médical et de l'institut de recherche Beckman de City of Hope (Californie). Les neurones affectés par le gène mutant comprennent des nerfs sensibles au goût, situés dans la tête et les pattes. Le rôle de ces neurones pourrait être d'empêcher l'attirance entre mouches mâles par la détection ou l'interprétation de phéromones aphrodisiaques produites par les mâles. Les auteurs soulignent qu'à la différences d'autres études montrant l'existance de mouches dont le système nerveux comporte une anomalie induisant un comportement homosexuel irréversible, "le rapport mâle-mâle dont il est fait état ici est différent car il peut être activé ou désactivé à différentes températures et n'est donc pas une conséquence d'un développement anormal". De précédentes recherches impliquant des manipulations génétiques sur la mouche avaient déjà permis d'amener ces drosophiles à un comportement homosexuel mais la procédure neuronale expliquant les modifications de préférences sexuelles demeurait inconnu. La Drosophile (Drosophila melanogaster) est l'un des organismes les plus étudiés par les généticiens. Ses gènes permettant d'établir certains parallèles avec l'homme. Le décryptage du génome de cette mouche a été achevé en 2000, avec le séquençage des quelque 13.600 gènes constituant l'acide désoxyribonucléique (ADN) de l'animal. pb