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Evénement
Le leurre du développement
durable
Voulu par le Président, le secrétariat d'Etat est une coquille
vide.
Par Laure
NOUALHAT
vendredi 30 mai 2003
Ça fait plutôt désordre. A la veille de la Semaine du développement durable
qui commence lundi, le biologiste Jacques Testart démissionne de la présidence
de la Commission française du développement durable (CFDD, mise en place par
Dominique Voynet) pour cause de divergence de vues et d'absence de moyens (lire
aussi en page 8). Une démission symbolique qui vise à dénoncer les errements de
la stratégie gouvernementale en matière de développement durable. «La
politique du gouvernement est une politique de renoncements durables», lance
de son côté Bruno Rebelle, président de Greenpeace France et pourtant membre du
Conseil national du développement durable (CNDD), mis en place l'année dernière
par la secrétaire d'Etat en charge du dossier, Tokia Saïfi, pour concurrencer la
CFDD. Belles phrases. Pourtant, ce n'est pas la bonne volonté qui manque. Le
discours de Jacques Chirac, affûté par Nicolas Hulot au sommet de Johannesbourg
en septembre 2002, avait fait son petit effet. «Nous sommes la première
génération consciente des menaces qui pèsent sur la planète. La première. Et
nous sommes aussi probablement la dernière génération en mesure d'empêcher
l'irréversible.» En quelques phrases brillantes, le président français
s'était promu grand défenseur de la planète en danger. Son ministère de
l'Ecologie, mené par Roselyne Bachelot et doté d'un secrétariat d'Etat au
Développement durable, était plein de bonnes idées. On allait voir ce qu'on
allait voir. Un an après son entrée en fonction, le bilan du secrétariat d'Etat frise le
zéro. «C'est pire que zéro puisqu'on effectue des retours en arrière,
constate Bruno Rebelle. La lutte contre l'effet de serre est une priorité,
mais on raugmente les crédits accordés à la route. L'Union européenne nous
annonce qu'il n'y a plus assez de poissons, mais la France se refuse à baisser
ses quotas de pêche.» Les belles paroles n'ont pas été suivies
d'effets, les commissions et autres conseils prennent des airs de coquille vide.
«On assiste à une surenchère de débats et de consultations publiques. Mais
les décisions prises ensuite ne tiennent absolument pas compte du contenu de ces
débats», poursuit, irrité, le président de Greenpeace France. Image et posture. Peut-être la Semaine du développement durable (1)
donnera-t-elle un véritable élan au concept en France ? Visites d'usines, portes
ouvertes dans des centres de tri de déchets ou des stations d'épuration,
nettoyage de cours d'eau... Dès lundi, une foule d'initiatives familiariseront
le public avec la notion de développement durable. Un tiers des Français avouent
n'en avoir jamais entendu parler (2). Tandis que les entreprises, d'EDF à Areva,
en passant par Shell ou Renault, ont saisi le moyen de se façonner une image
verte et propre et d'encaisser les bénéfices qu'une posture «écolo» peut
géné-rer. (1) www.semainedudeveloppementdurable.gouv.fr
(2) Sondage Ipsos réalisé en
avril dernier.