I N T E R N E T
En réseau pour changer le monde
«L'internet est peut-être notre dernière
chance pour sauver la planète», estime un groupe d'internautes et
d'entrepreneurs réunis à San Francisco. Reportage.
PAR FRANCIS
PISANI |
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La ville de San
Francisco ne se préoccupe pas seulement de gagner des milliards. On
y trouve aussi des activistes, des ingénieurs et même des hommes et
femmes d'affaires soucieux de construire un monde meilleur, mais
toujours avec un ordinateur et un téléphone cellulaire à portée de
main.
Certains d'entre eux se sont réunis du 6 au 8 juin
dans le cadre de la conférence Planetwork pour tenter de répondre à
la question suivante: comment utilisons-nous les outils de la
technologie pour renforcer la société civile et promouvoir le
développement durable dans un monde plus juste et plus pacifique?
«Nous nous appuyons sur le véritable héritage de l'internet
et sur l'élan de collaboration créative qui est à la racine de la
révolution high-tech», a expliqué Jim Fournier, organisateur de la
conférence, à Largeur.com. Le premier objectif de la conférence
était de faire connaître à la fois les instruments technologiques
les plus utiles et les pratiques les mieux réussies.
Plusieurs sessions ont été consacrées au développement des
logiciels de réseaux sociaux («social networks software») qui
permettent d'organiser les communautés virtuelles. Le service
Friendly Favors «réunit» plus de 35'000 personnes dans 152 pays.
C'est un réseau de réseaux qui utilisent une technologie commune,
une gigantesque base de données de gens ayant des objectifs
compatibles qui se recommandent les uns aux autres.
Michael
Litz, de OneWorld, un réseau basé à Londres, montre comment
l'utilisation de l'internet par des villages de pécheurs de la
région de Pondichéry permet, grâce à un point d'accès connecté à
l'organisation, de consulter la météo et de transmettre les
prévisions par haut-parleur, ce qui réduit les accidents. Les
téléphones cellulaires permettent d'obtenir, sous forme de texte ou
de message oral, les prix pratiqués sur les marchés de la région.
«C'est la génération X qui rencontre celle de 1968»,
explique Nancy Van House, professeur à l'Université de Berkeley.
Lors de la conférence, on a vu aux côtés des moins de trente ans
beaucoup d'hommes à cheveux blancs en queue de cheval qui tapaient
sur leur ordinateur pendant les sessions pour participer à des
discussions en ligne qu'un réseau WiFi rendait possible. Fascinant
exemple d'interactivité en temps réel.
Les activistes
d'aujourd'hui, ceux de San Francisco en tous cas, n'ignorent pas
l'activité économique. Il y a des hommes d'affaires dans le réseau
Planetwork, comme Paul Hawken, connu pour ses livres sur les
entreprises qui respectent l'environnement et patron de Groxis, une
société dont le logiciel facilite l'échange de connaissances.
C'est d'ailleurs l'une des caractéristiques de cette
mouvance: on a le droit d'y parler business, et même d'en faire à
condition de respecter l'environnement, de penser au développement
durable et de ne jamais oublier la responsabilité sociale.
Les participants à la conférenc ont également parlé de
«réseaux économiques». En ces temps de crise, le troc qui utilise
l'internet est en vogue comme l'a montré l'expérience argentine au
plus fort de la crise. Il facilite, même au niveau local, la mise en
rapport de l'offre et de la demande. Les participants sont
convaincus, pour reprendre les propos de Annette Briggs, que «les
idées et la technologie existent. Il n'y a plus qu'à les adopter».
Un des projets les plus ambitieux est la création d'un
«réseau social augmenté» (augmented social network), une référence
directe au terme utilisé par Doug Engelbart (présent à la
conférence), inventeur de la souris et de l'interface graphique qui
a toujours vu dans l'ordinateur un moyen d'augmenter les capacités
humaines. Ses héritiers entendent maintenant appliquer les mêmes
principes aux réseaux.
Il s'agit selon Ken Jordan, l'un des
promoteurs du projet, d'incorporer la reconnaissance de «l'identité
et de la confiance dans l'architecture de l'internet -- dans
l'intérêt du public -- de façon à faciliter la mise en relation
entre personnes qui partagent les mêmes affinités ou dont les
capacités se complémentent mais qui appartiennent à des réseaux
sociaux différents.»
La création de mécanismes permettant de
reconnaître ceux qui se connectent et de s'assurer qu'ils sont bien
qui ils prétendent être -- la question de l'identité et de la
confiance -- sont au premier rang des priorités des activistes
sociaux comme des hommes d'affaires. Mais l'identité qui préoccupe
Jordan et ses amis «est celle du citoyen virtuel, plus que celle du
consommateur».
«Un grand nombre de personnes et de
compagnies veulent faire quelque chose de valable pour résoudre les
problèmes de la planète», explique Jim Fournier, l'organisateur de
la conférence. «L'internet est peut-être notre dernière chance pour
sauver la démocratie et, peut-être, pour éviter une catastrophe
écologique globale.»
Planetwork: http://www.planetwork.net
Friendly Favors: http://friendlyfavors.org One World:
http://www.oneworld.net Groxis: http://www.groxis.com
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