mercredi 30 juillet 2003
Actualités
Newsletters
Multimédia
Images
Télécharger
Références
Archives
Eté 2003
Lemonde.fr Les Dépêches Le Desk Forums Conférences UTLS
Rechercher

depuis

A LA UNE
international
europe
france
société
régions
carnet
horizons
analyses & forums
entreprises
communication
aujourd'hui
météo
sports
sciences
culture


version texte


CHAINES
aden
examens 2003
finances
forums
mots croisés / jeux
automobile

ANNONCES
emploi
immobilier


Le Monde en PDF
Le quotidien prêt à imprimer

Jacques Santamaria, "écrire pour l'image"
LE MONDE TELEVISION | 25.07.03 | 16h38
SCÉNARISTE. "Il faut que tu écrives pour l'image", lui avait dit François Truffaut. C'était en 1975, il était alors journaliste. Depuis, Jacques Santamaria a produit plus d'une trentaine de scénarios pour la radio, la télévision ou le cinéma. Troisième rendez-vous de notre série d'été

Il rit, heureux. Il vient de recevoir le prix du Nouveau Talent TV 2003, décerné par la Société des auteurs-compositeurs dramatiques (SACD), et trouve cela franchement comique. "Je suis très flatté d'avoir ce prix, mais c'est le mot "nouveau" qui m'amuse. Vous pensez, en 1974 déjà, je faisais du documentaire pour la télévision ! Cela fait pratiquement trente ans..."

Jacques Santamaria, la petite cinquantaine confortable, est à la fois auvergnat et corse, discret et bavard, courtois et narquois. L'œil vif derrière ses lunettes rondes, il prend son temps pour parler et choisit ses mots avec autant de soin que le vin qui va accompagner son déjeuner. Un connaisseur !

Le scénario, ça le travaille depuis l'enfance, du temps où il dévorait les livres d'aventures, les films en Technicolor et les feuilletons radiophoniques. Non pas qu'il voulait faire l'acteur ; il rêvait bel et bien d'écrire des histoires pour les faire jouer par les autres. La légende familiale raconte même que, à l'âge de 6 ans, il aurait déclaré à ses parents : "Quand je serai grand, je causerai dans le poste."La réponse ne s'est pas fait attendre : "On verra plus tard, va à l'école et passe ton bac." Il a obéi, en bon fils, et même un peu plus, puisqu'il a obtenu sa maîtrise de droit.

Mais, obstiné "comme un teckel qui ne veut pas lâcher son os"- l'expression est de lui -, il fera toute sa carrière dans l'audiovisuel public. Entré à l'ORTF en 1972, il occupe toutes sortes de fonctions, histoire de se faire la main : écrivain de pièces satiriques, animateur du "Top 50", journaliste... Il quittera définitivement la radio en 1999, après avoir occupé les fonctions de directeur des programmes de France-Inter. "Le couronnement de ma carrière radiophonique", dit-il dans un grand éclat de rire.

Et puis, comme dans les histoires pour enfants, il rencontre un bon génie. Et ce bon génie s'appelle François Truffaut. En reportage sur le tournage de L'Argent de poche, en 1975, Jacques Santamaria sympathise avec le cinéaste. Une amitié se noue. Les deux hommes parlent métier, tant et si bien qu'un jour Truffaut lui glisse à l'oreille : "Jacques, maintenant, il est temps de rentrer dans le rêve. Il faut que tu écrives pour l'image." Il n'a jamais oublié ce conseil, et avoue même que, s'il est scénariste aujourd'hui, il le doit entièrement à Truffaut.

Cette même année, Georges Conchon lui demande de travailler avec lui sur le scénario de Sept morts sur ordonnance, réalisé par Jacques Rouffio. "Je lisais, relisais et commentais. Quelle formidable école ! Il faut que je vous avoue, quitte à passer pour un iconoclaste, que je ne crois absolument pas à toutes ces écoles, stages et autres maîtres ès scénarios qui veulent former des scénaristes en dix leçons. Vous imaginez un peu le nombre de bons films qui seraient réalisés si tous ces gens qui suivent des stages se mettaient tout à coup à bien écrire ! L'imagination ne s'apprend pas. Seul le métier de journaliste s'apprend, et c'est la meilleure école pour écrire des histoires. On enquête, on furète, on cerne son sujet puis on rédige. Visionner La Comtesse aux pieds nus de Mankiewicz en apprend plus au néophyte que toutes les écoles réunies."

DE LA RADIO AU CINÉMA ET À LA TÉLÉ

Obéissant en partie à Truffaut, il "rentre dans le rêve" en créant, en 1985, sous l'impulsion de Jean-Noël Jeanneney, alors PDG de Radio France, les Ateliers de création radiophonique décentralisés pour alimenter les stations locales de Radio France en programmes élaborés. Il en prend la direction avec la volonté de créer des émissions vivantes pleines de sons et de sens. Les séries que les ateliers produisent, telles que "Le Tour de France", truffé d'archives, ou un lumineux "Van Gogh", restent des pièces d'anthologie. Il met lui-même la main à la pâte en écrivant des polars non dénués d'humour. "Ecrire pour la radio est tout un art, car l'oreille travaille plus vite que l'œil ; on est obligé de réunir concision et richesse, et de sacrifier les dialogues quand le son est puissant."

Le temps venu, il se décide à "écrire pour l'image" et, à la demande du réalisateur Jacques Tréfouel, adapte pour le cinéma Les Eaux dormantes, un suspense criminel et psychologique emprunté à Boileau-Narcejac.

L'écriture est pour lui un art majeur et, comme tel, il y apporte un soin extrême. Tout d'abord, il se met en quête d'un sujet, dépouille la presse, découpe les faits divers, écoute les conversations de comptoir, file l'homme de la rue ou, à l'inverse, se plonge dans des livres d'histoire à la recherche d'événements susceptibles d'être transformés en fiction. Il prend beaucoup de notes sur des petits bouts de papier, et, quand enfin il tient la bonne idée, commence alors un long travail de gestation.

"Je fouille, je farfouille, je tournicote, j'explore, j'examine, je scrute, j'invente. Je grogne et je ronchonne. Cela me prend énormément de temps. Puis, quand l'ensemble me paraît limpide, vient alors le moment de coucher tout ce travail sur le papier, c'est pour moi ce qu'il y a de plus rapide." Là encore, maître Jacques ne fait rien comme tout le monde ; foin du traitement de texte. Installé à sa table de travail, deux bouteilles d'eau et un cigare pour tout viatique, il taille tranquillement ses crayons à mine de plomb avant de rédiger son histoire d'une belle écriture régulière. "Je préserve ainsi l'aspect artisanal et solitaire de mon travail." Le manuscrit corrigé, raturé, reste cependant toujours lisible pour les petites mains qui le rentreront dans l'ordinateur. Il a ainsi écrit une bonne quinzaine de films de cinéma et de télévision, et plus d'une vingtaine de pièces pour la radio.

Cette belle carrière de scénariste a bien failli s'arrêter le jour où il fut nommé directeur des programmes de France-Inter. "Quand on a un poste comme celui-là, il est impossible d'avoir le temps d'écrire. On rentre chez soi, le soir, complètement vidé." Il en profitera pour faire accepter plus d'imaginaire dans les programmes de la station, en favorisant les reportages et en rétablissant un genre oublié, le feuilleton radiophonique, avec, notamment, Le Perroquet des Batignolles, Les Fantastiques Aventures de Mme Muller ou Le Secret du coffre rouge.

En 1999, il retrouve sa liberté et retourne à l'écriture. France 3 lui commande alors un film de prestige en costumes. "Il y a longtemps que le personnage de Bernard de Fontenelle m'intriguait. Ce philosophe, neveu de Corneille, qui mourut à 100 ans, se félicitait de n'avoir jamais prononcé le mot amour." Mélangeant fiction et réalité, Jacques Santamaria écrit, dans un français élégant, Un cœur oublié, dans lequel il analyse finement le sentiment amoureux chez Fontenelle. Michel Serrault, enthousiaste, accepte le rôle d'emblée : "Un scénario comme ça, on m'en propose un tous les vingt ans." Le film est un succès.

LES CONTRAINTES DES CHAÎNES

Toujours pour France 3, il imagine un polar, La Deuxième Vérité, sur les mœurs de la bourgeoisie de province, truffé de rebondissements, dans lequel son vieux copain Claude Chabrol joue le rôle d'un médecin de campagne. Là encore, le succès est au rendez-vous. Philippe Monier, le réalisateur de ces deux derniers films, n'hésite d'ailleurs pas à dire : "C'est un plaisir de travailler avec Jacques, son écriture perfectionniste et économe donne tout de suite à voir la dramaturgie. De plus, c'est un scénariste qui tient compte du budget du film."

Intarissable, Jacques Santamaria analyse les différentes facettes de son métier. "Je n'écris pas de la même façon pour la télévision, qui est regardée par un public zappeur, et pour le cinéma, où les spectateurs captifs ont fait l'effort de venir. Là, j'ai le temps d'installer un climat. La radio, c'est encore différent : en l'absence d'images, c'est une école de rigueur formidable." Il constate surtout que, depuis une quinzaine d'années, la fiction, qui fait de plus en plus d'audience, est devenue un enjeu économique important. "Cette évolution a entraîné la professionnalisation du métier de scénariste. Il faut savoir que ce qu'on écrit tranquillement à sa table peut poser d'énormes problèmes lors de la réalisation. Ecrire en dehors de toute contingence est tout bonnement une faute." Quand on lui parle des contraintes du cahier des charges imposé par les chaînes, il répond avec une prudence tout auvergnate : "Ayant collaboré avec toutes les chaînes, je peux dire que je n'ai jamais ressenti de manque de liberté. L'écriture est une vaste et infinie contrainte, et s'il y a manque de liberté, c'est plus dans les moyens que dans les idées. Il faut travailler et encore travailler, cela permet de contourner beaucoup d'obstacles."

Des propos qui amusent son ami Claude Chabrol : "J'ai fait pas mal de télévision, mais j'ai laissé tomber. C'est un vrai parcours du combattant ! Une fois le contrat signé, on a la visite quotidienne de ces petits messieurs de la direction qui viennent vous donner des ordres, le plus souvent contradictoires, pour vous imposer leur moule. Jacques est malin à ce petit jeu-là. Il passe au travers des fourches Caudines de ces petits messieurs en faisant croire qu'il utilise le moule... Mais, en fait, il le casse ! Il est très fort."

Armelle Cressard


Formation

ESRA , Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle, à Paris (tél. : 01-44-25-25-25), Nice (04-92-00-00-92) et Rennes (02-99-36-64-64).

FEMIS, Ecole nationale supérieure des métiers de l'image et du son, à Paris (01-53-41-21-00).

UNIVERSITÉ PARIS-I Panthéon-Sorbonne (01-44-25-04-03). www.univ-paris1.fr

UNIVERSITÉ PARIS-III Sorbonne nouvelle (01-45-87-42-28).

UNIVERSITÉ PARIS-VIII Vincennes-Saint-Denis (01-49-40-67-89).

UNIVERSITÉ AIX-MARSEILLE-I (04-92-95-35-46).

UNIVERSITÉ BORDEAUX-III Michel-Montaigne (05-57-12-44-57).

Pour de plus amples informations, lire Le Guide : scénario, mode d'emploi, édité par la revue Synopsis, 8, rue Martel, 75010 Paris (01-53-34-17-17).


Parcours

1951
Naissance à Lezoux, Puy-de-Dôme

 1975
Rencontre avec François Truffaut

 1985
Direction des Ateliers de création radiophonique (Radio France)

 1992
Scénario des "Eaux dormantes", pour le cinéma

 1996
Il est nommé directeur des programmes de France-Inter

 1999
Il quittecla radio pour se consacrercà l'écriture

 2001
"Un cœur oublié" pour France 3

ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 26.07.03







Liens publicitaires
Internet, réseaux et communications avec Dell.fr
Dell propose une gamme complète de serveurs conçus pour répondre à tous vos besoins, de la plus petite entreprise aux plus grandes multinationales.
Réalisation de vos supports de communication
De la création de sites à la réalisation de cd rom, les Artisans Numériques assurent la réalisation et le suivi de vos supports de communication.
News and Paper - conseil en communication
Nous sommes une agence specialisée dans le marketing operationnel. Située à Courbevoie, l'agence est organisée autour d'une structure fortement réactive et souple.
  




Article au format texte pour impressionEnvoyer par email cet article à un amiClasser cet article dans votre classeur personnel


A lire aussi
 
LE MONDE TELEVISION | 18.07.03 | 16h08
LE MONDE TELEVISION | 11.07.03 | 17h34
LE MONDE TELEVISION | 11.07.03 | 17h34


fiches pays
 
Accédez à un pays




Droits de reproduction et de diffusion réservés © Le Monde 2003
Usage strictement personnel. L'utilisateur du site reconnaît avoir pris connaissance de la licence de droits d'usage, en accepter et en respecter les dispositions.
Politique de confidentialité du site.
Besoin d'aide ? faq.lemonde.fr