Casinos.
Les casinos 
aux petits soins des joueurs
Plusieurs 
grands groupes développent la prévention des abus du jeu, pour recruter de 
nouveaux clients et s'attirer les bonnes grâces de l'Etat.
Par D'ALLONNES David REVAULT
samedi 19 juin 
2004 
(1) Le PMU a grimpé de 9,5 % et la 
Française des Jeux de 4,8 %. Schizophrène. L'initiative est savoureuse, quoiqu'un poil 
schizophrénique. «Pas facile d'expliquer à un client en train de perdre : ce 
soir, c'est pas votre soir, partez», poursuit Joël Mingasson. A tel point 
que le projet, présenté en son temps aux cadres d'Accor casinos, avait recueilli 
68 % d'opinions négatives... Mais pour les industriels du secteur, l'enjeu est 
d'importance. D'abord, parce que «quelqu'un qui se voit interdire de jeu est 
un échec pour le casino, qui perd ce client à tout jamais», selon Mingasson. 
Mais aussi et surtout parce que cette offensive de charme s'accompagne de 
plusieurs revendications de la part des casinotiers. Lesquels, avec une 
croissance de 3,7 %, estiment être «un peu à la traîne» par rapport à 
leurs concurrents (PMU et Française des Jeux), dans un marché du jeu qui, 
globalement, a grimpé de 6,7 %. «Notre croissance est principalement due aux nouveaux casinos ou aux 
nouvelles machines à sous, explique Joël Mingasson. La majorité des 
casinos qui vivaient sur leurs acquis, à parc constant de machines, ont connu 
une croissance zéro ou une décroissance parce que la clientèle nouvelle manque 
de machines.» D'où le souhait des casinotiers de voir leur parc de machines à sous  
autour de 17 000 aujourd'hui  se développer vite et sans entraves. «Pour 
obtenir l'autorisation d'ouvrir 10 machines, il faut un dossier de 35 pièces et 
6 mois de travail», râlent les casinotiers, agacés par l'aspect très 
réglementé du marché et les «contrôles tatillons» de l'administration de 
tutelle : la sous-direction des Courses et Jeux du ministère de l'Intérieur, 
chargée de veiller à «la régularité et la sincérité des jeux». Tolérance. Une défiance qui remonte à la première loi sur les casinos, 
datant de 1907. «L'exploitation des jeux de hasard reste interdite en France, 
et il faut pour ouvrir un casino une dérogation du ministre de l'Intérieur, seul 
habilité à délivrer ces autorisations, résume-t-on à l'Observatoire des 
jeux. Pour résumer, l'Etat interdit le jeu mais autorise dans certains cas 
des sociétés privées à exploiter des casinos moyennant prélèvement. C'est ce 
qu'on appelle une tolérance, dont profitent les finances publiques.» Cette position irrite d'autant plus les industriels du jeu que le PMU se 
développe tous azimuts, que «la Française des Jeux sort un jeu nouveau tous 
les quatre mois, en général des jeux qui ressemblent de plus en plus à nos jeux 
de casinos...» Et que ces deux opérateurs poursuivent leur développement sur 
l'Internet, dont les casinos demeurent exclus (Libération du 15 mai 
2004). Ce qui n'empêche pas les cyberflambeurs français d'accéder aux centaines 
de loteries qui prolifèrent sur le réseau à partir de l'étranger. Mise en garde. Mais c'est surtout la fiscalité du secteur qui mobilise 
les industriels du jeu. Laquelle aurait augmenté de 10 % en dix ans, pour 
atteindre 55,5 %. Déjà soumis à sept impôts et taxes différentes, les 
casinotiers ont ainsi eu la désagréable surprise d'apprendre qu'ils 
supporteraient prochainement une nouvelle hausse de deux points de la CSG, qui 
devrait les délester d'environ 28 millions d'euros. «C'est une incitation à 
faire des affaires à côté, s'agace Georges Tranchant. En ce qui me 
concerne, j'investis à l'étranger le plus souvent possible.» En particulier 
en Suisse et en République dominicaine. Bref, autant d'arguments destinés à 
mettre en garde les pouvoirs publics contre une «perte de compétitivité» 
annoncée des casinos français.
u'on se le dise : les 
casinotiers sont des humanistes. Pas du genre à laisser leurs clients sur la 
paille. «C'est un vrai problème moral de se dire qu'on a ruiné des gens», 
soupire Georges Tranchant, PDG du groupe du même nom. Alors, Casinos de France, 
le syndicat regroupant, entre autres, les groupes Accor, Barrière et Tranchant 
(mais pas Partouche) et qui réalise plus de la moitié du chiffre d'affaires des 
casinos français, a présenté la semaine dernière à la presse un «kit de 
prévention aux risques d'abus de jeu», destiné aux salariés. Le principe en est 
simple, selon Joël Mingasson, président de Casinos de France et du directoire 
d'Accor casinos : «Quand on fait de l'alpinisme, on prévient les gens que 
c'est dangereux. Dans les casinos, c'est un peu pareil. Nous avons la 
responsabilité morale d'empêcher les gens de dépasser les limites, comme les 
bars ou boîtes de nuit avec l'alcool.»
http://www.liberation.fr/page.php?Article=216715