Filtrer le net, c'est 
«donner l'illusion de vivre dans un monde propre et en 
ordre»
Colloque international sur le 
terrorisme et le racisme sur l''Internet • La France plaide pour un code de 
bonne conduite et des dispositifs de filtrage • Meriem Marzouki, présidente de 
l'Iris, explique son désaccord •
Par Catherine COROLLER
mercredi 16 juin 2004 
(Liberation.fr - 12:23) 
«Si l'intolérance n'a pas gagné la partie,a déclaré le chef de la diplomatie 
française, elle a progressé presque partout en Europe ces dernières années, en 
s'appuyant notamment sur l'instrument à la fois extraordinaire et nouveau 
d'internet». Barnier a estimé que l'OSCE devait être le lieu d'un travail de 
réflexion, qui pourrait déboucher par exemple sur un code de conduite. Mais dès 
le début de la conférence, malgré un accord général sur la nécessité de 
combattre la diffusion d'appels à la haine sur internet, les approches 
paraissaient très différentes. Meriem Marzouki est la présidente de l'Association Iris (Imaginons un 
réseau Internet solidaire). Elle explique pourquoi elle n'est pas d'accord 
avec l'objectif de la conférence de l'OSCE sur «le lien entre la propagande 
raciste, xénophobe et antisémite sur Internet et les crimes inspirés par la 
haine»: l'élaboration de ce code de bonne conduite par lequel les professionnels 
de l'Internet s'engageraient à lutter contre les contenus incitant à la haine 
raciale et au terrorisme. Pourquoi jugez-vous qu'un code de bonne conduite ne serait pas efficace 
pour combattre les crimes racistes? Pour moi, il faut prévoir des sanctions très fortes. Sur les questions de 
racisme, il arrive qu'on se trouve face à des contenus absolument intolérables 
avec lesquels il faut être intransigeant. Et qu'on ne vienne pas me dire comme 
Renaud Muselier qu'il faut respecter les pratiques juridiques des différents 
états. C'est démissionner complètement. Les droits de l'homme sont 
universels. Que reprochez-vous aux codes de bonne conduite et aux dispositifs de 
filtrage? L'autre inconvénient des dispositifs de filtrage est qu'ils servent à fermer 
les yeux, qu'ils permettent de se barricader. Si on filtre les contenus 
racistes, qu'est-ce que ça signifie? Qu'on va faire comme si ces choses-là 
n'existaient pas, qu'on ne va pas les voir donc on ne va pas lutter. Il faut 
laisser les contenus apparaître de façon à pouvoir mener des actions auprès des 
pays où tenir de tels discours n'est pas réprimé.  L'autre danger de ces dispositifs, c'est qu'on fait des gens des mineurs. 
Comme on les empêche de porter les yeux sur ces contenus, on leur donne 
l'illusion de vivre dans un monde propre et en ordre. C'est aller beaucoup plus 
que loin que ce que prévoit la loi. La loi ne dit pas qu'il faut empêcher les 
populations d'avoir accès à ce genre de discours. Elle dit qu'il faut réprimer. 
Le risque de ces dispositifs, c'est enfin qu'ils soient utilisés pour d'autres 
objectifs, de censure ou d'atteinte à la liberté de création. Sur le net Dans Libération du 16 juin
a France est à 
l'initiative de la conférence de l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la 
coopération en Europe) sur «le lien entre la propagande raciste, xénophobe et 
antisémite sur Internet et les crimes inspirés par la haine» qui s'est ouverte 
mercredi matin à Paris. Michel Barnier, le ministre des Affaires étrangères 
ouvrira ce matin les débats, François Fillon (Education nationale) et Renaud 
Muselier (secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères), la clôtureront demain. 
S'en remettre à des méthodes de 
gouvernance comme un code de bonne conduite qui est un espace de droit mou, ou 
des dispositifs techniques de filtrage comme le recommande Renaud Muselier (dans 
une tribune du Monde de mercredi à ne me semble pas de nature à résoudre la 
question. Mieux vaudrait essayer de faire avancer cette idée que le racisme et 
la xénophobie ne sont pas des opinions mais des délits, y compris dans les pays 
comme les Etats-Unis où, au nom de la liberté d'expression, on refuse toute 
sanction. 
Ils sont synonymes d'un désengagement de l'Etat et de ses 
prérogatives. Et ils reposent sur une très forte intervention des intermédiaires 
techniques privés et des représentants des différentes communautés. On voit très 
bien vers quels dangers on va si on laisse tout entre ces mains-là. Avec une 
charte de bonne conduite par-ci et un dispositif de filtrage par-là, l'Etat se 
défausse. Il laisse les associations, voire les communautés, décider de ce qu'il 
faut filtrer ou non. 
Iris
4 000 sites pas très 
nets recensés sur la Toile
Les censeurs du Net 
censurés
http://www.liberation.fr/page.php?Article=215717