e Dr Patrick Métais, chef de service
de gériatrie à l'hôpital de Neuilly-Courbevoie
(Hauts-de-Seine), revient pour Libération
sur les images d'un pape très diminué par sa
maladie de Parkinson.
Comment comprendre ces images en gros
plan?
Le pape souffrant d'un Parkinson évolué, je
suis assez épaté de la performance des médecins
italiens, de l'organisation thérapeutique mise
en place pour qu'il puisse accomplir son
programme. Tout autre malade au même stade
serait incapable de faire ça. La démarche
thérapeutique fonctionne par injection de
médicaments, mais au-delà d'une heure, une heure
et demie, l'effet s'estompe et on se retrouve
face au pape parkinsonien. Comme n'importe quel
autre malade, il est bavant, atonique, en grande
difficulté, incapable de prononcer des mots.
Arriver à le maintenir si longtemps est une
performance, signe d'une équilibration
thérapeutique exceptionnelle.
Quel sera l'impact sur la représentation
du très grand vieillissement ?
Cela va être extrêmement difficile pour tout
parkinsonien de voir à la télé ce qu'il va
devenir. Et pour nous, médecins, lorsqu'on va
avoir à annoncer un tel diagnostic, car les
patients auront en tête cette représentation
actuelle de l'état du pape. La problématique est
ici religieuse, sacrificielle, de l'ordre du
martyre. On est dans une démarche de dépassement
corporel. Je ne suis pas sûr que cela fasse
avancer les principes religieux fondamentaux. Il
faut rappeler que, chez les plus de 80 ans, 75 %
sont en bonne forme et seuls 25 % ont des
problèmes de dépendance, dont ce type de maladie
grave. Un centenaire sur deux est totalement
valide. Ce que montre le pape, cela existe pour
une minorité de la population âgée, ce n'est pas
inéluctable.
Le pape est-il conscient de son état
?
Tout à fait. J'ai entendu sa réponse à
Chirac, le pape est totalement lucide. Souvent,
les parkinsoniens sont lucides jusqu'au bout.
Continuer dans cet état, c'est son choix. Les
parkinsoniens n'ont pas de troubles de
l'émotion. Lorsqu'il était en pleurs dans la
grotte, il semblait réellement bouleversé. Du
fait de sa culture relationnelle avec la Vierge,
il était véritablement ému d'être là , à
Lourdes, alors qu'il ne s'imaginait pas en être
encore capable. A mes yeux, ce n'était pas une
émotion de malade, mais une émotion
réelle.