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Une étude parue dans "The Lancet"
du 27 août relance un vieux débat
L'homéopathie ne serait qu'un placebo
LE MONDE | 26.08.05 |
13h21 • Mis à jour le 26.08.05 | 13h21
a controverse sur l'efficacité thérapeutique
de l'homéopathie est relancée. Dans son édition datée du 27 août,
l'hebdomadaire britannique The Lancet publie une étude dont les
conclusions laissent clairement entendre que cette pratique médicale, mise au
point il y a près de deux siècles par l'Allemand Christian Friedrich Samuel
Hahnemann, n'aurait pas d'efficacité spécifique et serait, au total, comparable
à un placebo.
La question, récurrente, de la réalité et du caractère
reproductible ou non des résultats thérapeutiques de l'homéopathie est soulevée
depuis plus d'un siècle.
Comment comprendre qu'un milieu très hautement dilué et dont
il est parfaitement démontré qu'il ne peut pas matériellement contenir les
traces moléculaires d'une substance physiologiquement active pourrait,
introduit dans un organisme souffrant, corriger tout ou partie des
manifestations pathologiques ? Comment, surtout, faire la part de l'effet
placebo, cet effet thérapeutique d'ordre psychologique lié à la prescription de
toute substance présentée comme étant un médicament efficace, quand bien même
elle ne contient aucune substance pharmalogiquement active ?
REMISE EN CAUSE
Depuis une vingtaine d'années, des praticiens convaincus des
bienfaits de l'homéopathie et des industriels directement concernés ont
entrepris de démontrer, avec les outils de la science médicale et statistique,
que l'efficacité de l'homéopathie était spécifique et qu'elle était notablement
supérieure au simple, mais toujours mystérieux, effet placebo. Nombre de ces
travaux ont conclu de manière positive et certains ont même été publiés dans
des journaux prestigieux au premier rang desquels The Lancet (Le
Monde du 14 décembre 1994).
C'est la crédibilité même de la quasi-totalité de cette
production médico-scientifique qui est aujourd'hui remise en cause avec la
publication, dans l'hebdomadaire médical anglais, d'une étude conduite par un
groupe de huit chercheurs de nationalités suisse et britannique dirigés par le
docteur Aijing Shang (département de médecine sociale et préventive, université
de Berne). A partir d'une enquête portant sur 19 banques électroniques de
publications médicales, ces chercheurs ont repris la totalité des essais
cliniques étudiant les effets comparés des pratiques homéopathiques par rapport
à l'effet placebo.
Les pathologies concernées étaient très variées, incluant des
infections respiratoires, des manifestations allergiques, des affections
gynécologiques, musculosquelettiques, neurologiques ou gastro-intestinaux. Ils
se sont également intéressés aux essais cliniques comparant les pratiques de la
médecine conventionnelle (ou allopathie) à l'effet placebo. Tous ces essais
incluaient en moyenne 65malades, avec un éventail allant de 10 à 1 573
personnes.
Sur la base de ce matériel, les chercheurs ont retenus ce qu'ils
estimaient être les meilleurs essais. Ils ont ainsi constitué deux groupes de
110 publications chacun, qu'ils ont passé au crible d'une analyse statistique
hautement sophistiquée visant à débusquer les biais méthodologiques,
volontaires ou non, qui pouvaient entacher les résultats de ces travaux.
Les auteurs de cette publication expliquent avoir retrouvé des
biais méthodologiques dans les deux types de travaux et plus particulièrement
dans les essais cliniques de petite taille, ces derniers ayant plus que les
autres tendances à conclure au bénéfice des médications étudiées. Une fois ces
biais pris en compte, Aijing Shang et ses collaborateurs observent que rien, en
définitive, ne permet de penser qu'il existe une efficacité spécifique des
pratiques homéopathiques, une conclusion radicalement opposées aux observations
faites à partir des médicaments de la médecine allopathique.
Jean-Yves Nau
Article paru dans l'édition du 27.08.05
verbatim
"Dilutions absurdes"
LE MONDE | 26.08.05 | 13h21
ous publions ci-dessous des extraits de
l'éditorial de The Lancet daté du samedi 27 août :
"Pendant trop longtemps, l'homéopathie a bénéficié d'un
"laisser-faire" politiquement correct, mais des signes d'éclaircissement
apparaissent maintenant. La commission parlementaire britannique sur la science
et la technologie a rendu un rapport en 2000 au sujet de la médecine
complémentaire et alternative. Il recommandait que "toute thérapie qui
affirme spécifiquement être capable de traiter des situations précises doit
avoir la preuve qu'elle est en mesure de le faire au-delà de l'effet placebo
". Allant plus loin, le gouvernement suisse (...) a retiré la
couverture maladie de l'homéopathie et de quatre autres traitements complémentaires,
parce qu'ils ne satisfaisaient pas les critères d'efficacité et de rapport
coût/bénéfice.
(...) Les consommateurs de soins médicaux peuvent voir l'homéopathie
comme une alternative holistique à un modèle médical centré sur des maladies
précises et piloté par la technologie. L'état d'esprit des patients et des
fournisseurs suscitant la recherche de médecines alternatives crée un danger
plus important pour les soins conventionnels et la santé des patients que
les faux arguments sur les bénéfices potentiels de dilutions absurdes.
L'heure n'est probablement plus (...) à la poursuite de
recherches pour perpétuer le débat entre homéopathie et allopathie. Désormais,
les médecins doivent être (...) honnêtes avec leurs patients sur le
manque d'effets de l'homéopathie, ainsi qu'avec eux-mêmes sur les échecs de la
médecine moderne pour répondre à l'attente des malades en matière de soins
personnalisés."
Article paru dans l'édition du 27.08.05