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A propos de l'auteur

  • Michel Tarrier

    Je suis né à Paris en 1947, où j’ai passé une enfance heureuse mais « spécialisée » entre les insectes de la Forêt de Fontainebleau, les papillons du potager de ma grand-mère, les conseils d’un célèbre entomologiste voisin, une fidèle correspondance avec Jean Rostand, les laboratoires du Muséum national d’Histoire naturelle, les serres du Jardin des Plantes, mes livres de zoologie, mes collections d’insectes et l’inconscience de ne me préparer à aucun avenir. J’ai découvert mon premier insecte nouveau pour la science en 1965 (un Coléoptère : Carabus solieri tarrieri) et j’ai depuis consacré l’essentiel de ma vie à l’entomologie. J’ai vécu longtemps dans les Préalpes de Nice et depuis bientôt vingt ans, je suis en Andalousie, face au Maroc que j’aperçois de chez moi, les matins clairs, quand je n’y suis pas !

    Je ne publie pas que des livres entomologiques et l’inquiétude du devenir planétaire m’importe. Écologiste radical et écosophe dans l’esprit d’Hans Jonas et d’Arne Naess, je suis persuadé que l’homme moderne va à sa perte en agressant outre-mesure la biosphère. Mes livres font polémiques parce que je m’en prends aux monothéismes régnant et à l’anthropocentrisme insolent que j’estime coupables du manque de respect à l’endroit des paysages et des autres espèces ("2050, Sauve qui peut la Terre !"). Ma théorie est qu’en détruisant son milieu, l’humain pratique une politique de la terre brûlée qui va le conduire à un véritable autogénocide. Mon dernier pamphlet, "Faire des enfants tue", qui prône la dénatalité afin de soulager une planète exsangue, fait scandale en raison de la violence de son style.

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  • Lettre d'information
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« En permettant l’homme, la nature a commis beaucoup plus qu’une erreur de calcul ; un attentat contre elle-même. »
Emil Cioran.

Un précepte en guise de préliminaire et d’avertissement


Les civilisations qui ont sombré d’elles-mêmes furent pour le moins victimes de deux errances majeures : une gestion abusive de leurs ressources et une totale absence de régulation démographique. Ce phénomène paradoxal peut se nommer autogénocide. Ces deux comportements erronés sont si absurdes qu’on ne les appliquerait même pas à la maison ! Ce sont pourtant ces modes qui régissent et définissent l’actuelle période « pétrolivore » que nous nommerons oléocène de notre anthropocène, nouvelle ère géologique succédant à l’holocène.

La Terre n’est pas extensible, c’est un truisme. L’avenir ne nous commande plus l’expansion, mais la récession sous forme de décroissance natale (et économique !). Moins nous serons nombreux, plus nous serons prospères, voire heureux.

La bombe P


On aura tout essayé : vaines religions, morales oiseuses, altruisme pieu, humanisme à sens unique, mises en garde objectives, modélisées et « statistiquées »... Georges Bush père l’avait bel et bien avoué : « Notre mode de vie n’est pas négociable ! ». Et quel mode, les Nord-Américains (pas tous !) ne veulent pas partager leur big burger...

En dépit de ses capacités cognitives, notre drôle d’espèce semble dans la plus indigente incapacité de se contrôler, de ne plus tout détruire, tout envahir, tout décimer, de ne plus faire la guerre aux autres hommes, de ne plus faire la guerre à la nature. C’est presque trop tard, c’est même trop tard. La planète est en déliquescence, de plus en plus de contrées sont touchées, de plus en plus de gens ont une vie pourrie, on le constate, on en témoigne dans de savants symposiums et au café du commerce, on le dit, on le répète, ce n’est plus niable et ce n’est donc plus évitable. Du silex à Hiroshima, notre progrès n’aura été que technologique, si peu humain. Nous utilisons Internet mais nous avons conservé des reflexes médiévaux, si tant est que le Moyen-âge fut la période sombrement rustique à laquelle on nous fait accroire. Notre fameuse intelligence : pure idiotie !? Ou bien serions-nous simplement des milliards d’imbéciles obéissant toujours à de sinistres pouvoirs, des hordes de gueux gavés ou faméliques mais éblouis par une ploutocratie tyrannique ? Qui sont ces gens de pouvoir, quelles sont leurs malsaines inspirations ? La folie ? Tous Napoléon-Hitler-Pot-Bush ? Sauf Saint-Louis (...) et Obama ?! Probablement et c’est en tout cas la seule et unique réponse disponible.

Des chiffres tourmentés et commentés


Homo sapiens est la pire espèce invasive.
5,2 milliards d’hectares sur 13 milliards (40 %) de terres émergées sont menacées d’une irréversible désertification.
Notre monde est passé de 250 millions à quasiment 6,7 milliards d’habitants depuis l’an 1 de l’ère chrétienne.
Pour détailler un peu et prendre le pouls démographique de chaque grande contrée, donnons quelques chiffres comparatifs depuis l’incontournable Jésus-Christ jusqu’à l’an 2000 (date du bug avorté !) : Chine (et Corée) de 70 millions à 1,280 milliard ; Inde (Pakistan et Bangladesh compris) de 45 millions à 1,320 milliards ; Japon de 300 000 à 126 millions ; Europe (et Russie) de 40 à 782 millions ; Afrique (sans l’Afrique du Nord) de 12 à 660 millions ! ; Océanie de 1 à 30 millions ; Amérique du Nord de 2 à 307 millions ! ; Amérique latine de 1 à 600 millions.
Derrière ces chiffres se cache un grave problème : celui de la fracture sociale entre pays riches et pays pauvres.
En augmentant de 4 milliards, la population planétaire a triplé depuis 1950.
Chaque jour, il y a environ 400 000 personnes en plus sur la Terre et la population actuelle de 6,7 milliards d’êtres humains s’accroît chaque année de plus de 80 millions de personnes.
Nous ne totalisions que 3 milliards de terriens en 1960 pour presque 7 milliards aujourd’hui.
Les cinq ou six dernières décennies ont vu le triplement de la population humaine : de 220 millions en 1950 à 800 millions en 2000 pour le continent Africain, de 330 à 800 pour l’Américain, de 1 400 à 4 000 pour l’Asiatique et de 400 à 600 millions enfin pour l’Europe. Les chiffres sont exponentiels partout, sauf pour l’Europe qui n’a enflé que de 50 %.
Quoi qu’on en dise, nous avons toutes les preuves que la planète ne pourra pas nourrir 9 milliards de terriens en 2050 ou 17 milliards en 2100, à moins que, miracle, le monde occidental n’adopte la philosophie vitale de la simplicité volontaire, cesse de manger de la viande, de recourir aux transports coûteux et parvienne à une incontournable iniquité, celle qui consisterait à juguler le développement de la Chine, de l’Inde et du Brésil !

La France elle-même dénote un désir nataliste, dangereux et irresponsable. Dans les années 1960, le gaulliste Michel Debré, vertueux parmi les vertueux, suggérait un effectif de 100 millions de français (« Et moi, et moi, et moi... !  »). En 1988 dans sa Lettre aux Français, François Mitterrand se référait à « Une France pauvre d’enfants dans une Europe plus pauvre encore », et Jacques Chirac donnait de la voix quand il déclarait en 1994 que « Le recul de la natalité porte en germe la baisse de notre compétitivité  ». Il n’est pas sûr que ce rêve-cauchemar soit mis au rancart quand le chanoine Sarkozy se vante de l’accroissement démographique franco-franchouillard dans une interview à France 3 le 21 avril 2008. Avec 64 473 000 de personnes recensées au 1er janvier 2008, la France accuserait-elle une carence démographique et souffrirait-elle d’un complexe de Hong-Kong ? Faut-il sauver la planète ou seulement les caisses de retraite ?

Paradoxalement aux idées religieuses et au machisme toujours en vigueur, avec 1,29 enfants par femme, l’Espagne atteste un subit effondrement des naissances qui place ce pays dans le peloton de tête de la dépopulation européenne avant même l’Allemagne lucide (1,36) et aux côtés de bien des pays de l’Est (1,20 à 1,33). L’indicateur de fécondité conjoncturelle de l’Europe des vingt-cinq est de 1,51. Autre paradoxe pour une société longtemps rendue bigote par le franquisme et ses séquelles, les allocations familiales n’y existaient pas. Inquiet de cet effondrement nataliste, le gouvernement de Zapatero les a instaurées en 2007. C’est plutôt kitch !

Un bel et édifiant exemple est germanique. En 2035, l’Allemagne sera le pays à la population la plus âgée. Une femme sur quatre y renonce à avoir des enfants et, pour les diplômées universitaires, c’est une sur deux ! « L’élite de la République ne se reproduit plus » rapportait le magazine Der Spiegel en 2005.

La population de l’Inde a dépassé le milliard d’habitants et engendre chaque année 19 millions de personnes. En un an, l’Inde s’accroît de plus d’habitants que la population totale des Pays-Bas, pays surpeuplé de presque 17 millions d’habitants. Comment l’Inde pourrait- elle trouver le nécessaire pour entretenir chaque année 19 millions d’habitants supplémentaires, alors que les terres cultivables se rétrécissent drastiquement ? Contrairement à la Chine et nonobstant sa situation démographique tout à fait dramatique, l’’Inde n’observe ni politique de planning familial, ni la moindre mesure coercitive de régulation nataliste.

Avec un territoire à 94 % aride et désertique, l’Égypte (79 000 000 d’habitants) comptera une population humaine de 120 millions en 2050 !! Un enfant y naît toutes les 23,5 secondes (évaluation de 1995). Cette grande nation est ruinée par un islam bloquant tout progrès culturel, barrant toute émancipation de la femme et toute option restrictive en matière démographique, condamnant les citoyens assujettis à une pauvreté sociale, culturelle et économique à nulle autre pareille

Depuis le XXe siècle, le continent Africain connaît un boom démographique exceptionnel : 302 millions d’habitants en 1975, 591,3 millions en 2001, 855 millions en 2004, 922 millions en 2005. 45 % de la population africaine vit dans quatre pays : le Nigeria, l’Éthiopie, la République démocratique du Congo et l’Afrique du Sud.

En République populaire de Chine (1,3 milliard d’habitants) « L’État encourage la planification familiale pour assurer l’harmonie entre la croissance démographique et les plans de développement économique et social », c’est l’article 25 de la constitution chinoise et du malthusianisme ainsi constitutionalisé. Mais rappelons que la Chine est tout de même une dictature et que le palliatif de l’enfant unique imposé est discutable parce qu’il se traduit par un infanticide des filles. Depuis 2002, le versement d’une somme de 5000 yuans (510 euros) permet la naissance légale d’un deuxième enfant. Le salaire moyen urbain n’étant que de 1200 yuans, l’amende est évidemment dissuasive. La Commission chinoise pour la population et la planification familiale se félicite pourtant d’une économie de 400 millions de naissances puisque le taux de fécondité est passé de 5,8 enfants par femme dans les années 1970 à 1,8 actuellement.

Vers une vie invivable


En 2050, il n’y aura plus ni pétrole, ni gaz, donc plus de transports viables (marchandises, produits alimentaires...), ni d’agriculture productiviste. Sans la révolution verte conférée par les engrais azotés provenant de la pétrochimie, nous n’aurions pu alimenter et donc générer une telle surpopulation. Il a été dit et redit qu’une agriculture naturelle, strictement induite par le soleil et l’eau ne pouvait nourrir davantage que 2 ou 3 milliards de terriens. Mais après nous avoir empoisonnés avec une alimentation bourrée de résidus chimiques et médicamenteux, après avoir conféré la mort biologique du sol par une agrochimie démentielle, on nous assure maintenant qu’une agriculture biologique serait susceptible de nourrir 12 milliards de personnes. Soit ! Mais au-delà de ces 12 milliards qui interviendront bien avant la fin du siècle, que fera-t-on ?

Après avoir géré sur un mode minier les ressources, à la veille des disettes et des tarissements, alors que les derniers filons commencent à poindre à l’horizon de ce millénaire, nous voici pathétiquement angoissés par des dates fatidiques : 2040 : fin de l’uranium / 2050 : fin du pétrole / 2072 : fin du gaz naturel / 2087 : fin du fer / 2158 : fin du charbon, entre autres fins de ressources inscrites en ce début de millénaire (d’après le magazine Science et Vie hors série N° 243 de juin 2008 : Construire un monde durable). Ajoutons que le pic forestier est déjà dernière nous et que nous inaugurons la sixième phase d’extinction massive des espèces, la première pour cause anthropique.

Au fur et à mesure que ces carences vont survenir, dans la totale incapacité que nous sommes de les compenser à hauteur de l’incommensurable besoin, la vie deviendra progressivement invivable, les pénuries engendreront les pires conflits, notamment une guerre mondiale pour l’appropriation des ultimes sources alimentaires et énergétiques.

On a cru que la biomasse (agroénergie, agrocarburants, biocarburants, bioéthanol, biodiesel, biogaz, biométhane...), imaginée comme renouvelable, allait remplacer les énergies fossiles, mais nous savons déjà qu’il s’agit d’un chemin erroné. Palmier à huile, betterave, colza, soja, tournesol, canne à sucre, orge, maïs, seigle, riz... ne peuvent être cultivés à grande échelle qu’en défrichant des terres qui n’avèrent déjà insuffisantes pour nourrir la population planétaire. Leur raffinage nécessite des quantités astronomiques d’eau. Faminogènes pour les pays du Sud, l’avènement de tels nécrocarburants serait un crime contre l’humanité. On sait aussi que leur utilisation ne réduirait en rien nos problèmes de pollution et des émissions de CO2. Quant à la biomasse de seconde génération, de source ligno-cellulosique non comestible (bois, feuilles, paille...), sa production est à l’image des énergies douces et reste aléatoire à l’échelon des besoins planétaires.

D’ici 2050, deux milliards de personnes, c’est-à-dire 20 % des terriens, souffriront d’une carence d’eau. 3,2 milliards d’humains en manqueront totalement en 2080. On dénombre déjà plus de trois cents zones de conflits potentiels pour la maîtrise des fleuves internationaux, comme le Nil ou l’Euphrate, ou celle des nappes phréatiques. 1,1 milliard de personnes dans le monde n’ont pas accès à une eau de boisson provenant d’une source améliorée et seulement 10 milliards de dollars permettraient chaque année l’accès à l’eau à ce 1,1 milliard de personnes. 2,6 milliards de gens ne sont pas raccordés à un service d’assainissement de base. Certains rapports avancent que 15 000 personnes meurent quotidiennement de maladies transmises par l’eau, soit 10 fois plus que de tués par la guerre.

À qui profite le crime démographique ?


« N’est-ce pas le seul espoir de la planète que les civilisations industrielles s’écroulent ? N’est-ce pas notre responsabilité d’y travailler ? », déclarait Maurice Strong, à la tête du Sommet de la Terre de Rio 1992 pavant la voie au Protocole de Kyoto. « La cause immédiate de la crise écologique est le capitalisme qui est un cancer dans la biosphère », ajoute Murray Bookchin, de l’Institut for Social Ecology (USA).

Derrière la bonne parole nataliste, à masque paternaliste, sont tapies d’immondes arrière-pensées économiques, militaires, nationalistes, racistes, handicapées d’une myopie écologique hypothéquant tout futur universel. Avec ce que l’on sait maintenant, encourager la surpopulation, c’est cautionner un crime volontaire contre l’humanité. Les ressources n’étant pas élastiques, l’appropriation des plus forts ne peut qu’entraîner une famine des plus faibles.

« Travail-famille-patrie » et ses variantes du style « dieu-patrie-roi », telles sont les trilogiques recettes des peuples voués au lapinisme, corvéables à merci, disponibles sur un geste, pour le plus grand profit des marchands d’armes (de bible et de coran réunis), soutenus par les dogmatismes religieux. On fit même construire à une multitude forcée et pour la multitude soumise, de pharaoniques cathédrales, sous les coups de fouet et au prix du sang. Il faut faire des petits pour fournir la clientèle au lobby du travail (main d’œuvre, nouveaux esclavagistes, travailler plus et jusqu’à 70 ans pour gagner moins / choisir son dimanche en travaillant pour le même salaire que le lundi, ou bien pour dilapider son gain au temple hypermarché qui ne ferme plus). Il faut engendrer au plus grand profit du lobby consumériste en tous genres, pour celui de la santé (le même qui nous rend malades promet de nous soigner), pour ses filières médicopharmaceutiques, vaccinales..., pour celui agrochimique et semencier auquel il faut rendre grâce de nous nourrir au meilleur rapport vie/mort (plus de bouches à nourrir, plus de corps à soigner, davantage de profits en perspectives).

Les guerres, les cataclysmes, les pandémies sauraient écrémer les populations et faire respirer la Terre si politiques, religieux, industriels et banquiers ne suggéraient à chaque fois aux survivants de bonne volonté de remettre le couvert, de féconder davantage pour une énième remise à niveau. Finalement, procréer c’est peupler les cimetières.

Quelques écogitations politiquement incorrectes


Nous feignons d’ignorer la finitude d’un monde dans laquelle notre multitude puise allègrement et sans relâche.
Il faut quelque chose de plus qu’un couple pour faire un enfant, il faut au moins une planète viable.
Le problème n’est pas tant d’engendrer un bébé que de faire subséquemment un adulte.
Posséder une famille nombreuse n’est-il pas un délit environnemental, une grave atteinte à la planète et à l’avenir commun ?
Pour un ami de la Terre, toute abstinence à la procréation humaine, toute pénurie des naissances sont reçues comme de bonnes nouvelles.
Sans peur ni reproche du métissage, le renouvellement des générations des pays développés devra se faire par les immigrants.
Contrairement à toute logique, la décroissance démographique reste un problème épineux, un énorme tabou qui n’ose pas dire son nom, un scandale qui provoque tous les courroux.
Suggérer de modérer la démographie d’un monde en proie à la surpopulation semble relever de l’outrage, de l’infamie, tant le thème appartient à la langue de bois.
Si vous estimez que nous n’avons aucune responsabilité ni vis-à-vis des 11 millions d’enfants qui meurent chaque année avant d’atteindre leur cinquième anniversaire, ni à l’endroit des 900 millions de personnes sous-alimentées, encore moins des espèces végétales et animales qui disparaissent à la vitesse grand V, que notre reproduction n’est pas excessive ou en tout cas acquittée de telles accusations, alors oui, faites encore et encore des enfants. Mais faites vite !
La fécondité humaine est une malédiction.
Quelques générations vouées à seulement un enfant par femme, voire assurer un soutien financier aux couples qui n’enfanteraient pas, serait cependant le programme d’une politique volontariste, courageuse et écoconsciente.
La survie de l’humanité dépend du possible, et non de l’impossible.
L’impossible, on l’a dit, c’est une meilleure gestion et une plus juste répartition des ressources. On a tout essayé depuis des lustres et même la morale égalitaire professée par les grands livres n’a pas donné les résultats escomptés.
Le possible pour cultiver les futurs, c’est d’encourager une mondialisation de la dénatalité.
Tout pacte écologique devrait sous-tendre l’idée d’un pacte antinataliste et le souci démographique devra être imbriqué à celui écologique, les deux thèmes étant incontestablement rétroactifs.

Les handicaps, le front des vertueux, une vraie vérité qui dérange

La propagande nataliste est rampante, sournoise et insidieuse. Elle est généralement le fait des partis politiques les plus rétrogrades et liberticides qui soient, ceux qui prônent simultanément des valeurs fétides, comme le racisme, le sexisme et le spécisme, ceux qui évidemment n’inscrivent l’écologie qu’à contrecœur à leur programme et n’en font qu’un hochet électoral, une occasion de blanchiment vert au profit d’un marché de dupes. Le populationnisme est frère de lait du populisme, c’est toujours une doctrine de masse niant toute dignité, toute légitimité. Chez ces chantres patriotiques et jamais mondialistes (dans le sens universaliste du mondialisme et non mercantiliste de la mondialisation !), la dépendance des hommes est celle d’une providence divine, la souffrance n’est pas vue comme misère, mais comme une épreuve de force génératrice de santé. Une population croissante stimule l’orgueil et le prestige national (Front National !). Pour les colporteurs du dogme, fascinés par le troupeau, s’abstenir d’enfanter est à la limite du péché. On se reproduit ou on se confesse.

Comment vaincre et convaincre les curés, les rabbins, les imams et tous les autres dictateurs religieux, aveuglément opposés à la contraception, préférant que les enfants meurent de faim ou sautent sur des mines antipersonnel, plutôt que d’empêcher leur naissance ? Où le dogme blesse, c’est qu’il interdit la réflexion. Les autorités religieuses forment une véritable association de malfaiteurs avec les nouveaux marchands du temple générés par un néolibéralisme en proie à un instinct forcené du profit. À leur service, les pouvoirs publics se refuseront toujours à adopter une politique démographique restrictive. N’en déplaise à l’ignoble propagande des vertueux, il n’y a qu’une raison légitime et éco-malthusienne de ne pas avoir d’enfant, c’est de ne pas surpeupler davantage la seule planète dont nous disposions. Les discours vertueux sont toujours acclamés, notamment par ceux qui n’y perçoivent pas l’irréalisme, voire le cynisme, bien que la mise en pratique de ces discours soit la cause de leur misère quotidienne. Si elles acceptent de régresser, les sociétés obèses détiennent la clé budgétaire pour assister celles faméliques. L’Occident aura alors moins à redouter des ventres pleins que de ceux vides, les gens qui sont à l’aise chez eux n’ont aucune envie d’aller chercher des eldorados. Ce n’est pas le cas des Haïtiens, des Cariocas, des Cairotes ou des Bangladais, des Thaïs et des Malais, qui, l’estomac resserré, ne se découragent pas de reproduire pour envoyer leurs enfants chercher des pépites d’or dans les immondices ou proposer leur corps à la transgression morale du tourisme sexuel (ce sont chaque année 85 millions de touristes occidentaux qui choisissent leur destination selon l’offre sexuelle).

Les briseurs de tabou et quelques éloquences

Depuis Malthus le maudit, pasteur anglican de la fin du XVIIIe siècle, et David Ricardo, économiste du XIXe siècle, peu de personnalités se sont aventurées sur le chemin de la dépopulation, tant le risque d’anathème et de lynchage intellectuel est grand. Les déclarations éco-malthusiennes exigeant du courage ou un brin de folie, elles se comptent donc sur les doigts de la main.

C’est en 1968 que le Club de Rome charge une équipe d’experts du Massachusetts Institute of Technology d’un rapport ambitieux susceptible de préconiser des solutions pratiques aux problématiques planétaires. Sorti en 1972 sous le nom de Limits of Growth (Halte à la croissance ?), l’étude met en exergue les dangers écologiques de la croissance économique et surtout démographique. Avec un second rapport publié en 1974, ces travaux sont connus sous le nom de rapports Meadows et défendent la croissance zéro, soit un équilibre au lieu d’une croissance réelle. A l’époque, la démographie s’accélèrerait d’une année sur l’autre, atteignait 3,6 milliards d’habitants en 1970 après avoir doublé tous les 32 ans. Quant à la croissance économique, elle favorisait les pays développés, accroissant ainsi les disparités de développement : « Les riches s’enrichissent et les pauvres font des enfants ».

La seule ONG qui se soit immiscée sur le terrain dénataliste fut le WWF lors de son 3e congrès de 1973 qui avançait que l’explosion démographique était la cause principale de la crise de l’environnement. Le WWF affirmait alors sa conviction que tous les gouvernements avaient le devoir d’envisager les mesures à prendre sur le plan mondial pour stabiliser et finalement ramener la population humaine à un niveau adapté à la capacité de charge des terres et des océans. Ces mesures devaient être concrétisées de toute urgence, non seulement en vue d’assurer la conservation des ressources naturelles, mais également pour permettre à l’humanité de jouir d’une qualité optimale de vie. Il semblerait bien qu’une telle sortie n’ait pas eu l’heur de séduire et si le WWF fait la légitime promotion de l’empreinte écologique susceptible de culpabiliser dans le bon sens tout un chacun, l’association internationale se contente de brandir le besoin d’une seconde planète à l’horizon 2030, sans s’appesantir davantage sur la sacro-sainte procréation responsable de la fourmilière humaine.

Ken Smail, professeur au département d’anthropologie du Kenyon College (Ohio, USA), auteur de plusieurs articles et essais sur la population parus notamment dans Population and Environment, Politics and the Life Sciences, est un dénataliste convaincu. On pourra lire un article de lui, traduit de World Watch et disponible sur la toile : Réduction de la population mondiale : faire face à l’inévitable.

Bernard Werber, auteur culte, est l’actuel communicant majeur en matière de limitation démographique. Il désigne la surpopulation comme la cause de nos malheurs dans la plupart de ses interviews sur le sujet écologique qui lui tient à cœur. Il interpella Nicolas Hulot lors de l’émission Riposte du 5 octobre 2008, mais ce dernier esquiva l’embarrassante question (embarrassante quand il s’agit de ne pas déplaire aux maîtres du monde, très douteux sponsors).

« L’épanouissement de la vie et des cultures humaines est compatible avec une diminution substantielle de la population humaine. L’épanouissement de la vie non-humaine requiert une telle diminution. »
Arne Naess, 1973

« Ne me parlez pas de pénurie. Mon monde est vaste et a plus qu’assez - pour un nombre limité. Il n’y a pénurie de rien, à part de volonté et sagesse ; mais il y a un surplus de gens. »
Garrett Hardin, 1975.

« Un humanisme bien ordonné ne commence pas par soi-même, mais place le monde avant la vie, la vie avant l’homme, le respect des autres êtres avant l’amour-propre. »
Claude Lévi-Strauss, 1968

« Notre société devient une société de consommation effrénée. C’est un cercle vicieux que je compare au cancer... Devrions-nous éliminer la souffrance, les maladies ? L’idée est belle, mais peut-être pas profitable à long terme. Notre peur des maladies ne doit pas mettre en danger le futur de notre espèce. C’est une chose terrible à dire. Mais pour stabiliser la population mondiale, nous devons éliminer 350.000 personnes par jour. C’est une chose horrible à dire, mais ne rien dire l’est encore plus. »
Jacques-Yves Cousteau, interview publiée par le Courrier de l’Unesco, novembre 1991.

« Nous périrons sous les berceaux. Nous sommes le Cancer de la Terre ; la pullulation de l’espèce humaine est responsable d’une pollution ingérable par la nature. Cela est tellement évident qu’on se demande de quel aveuglement sont frappés nos dirigeants. La nature, dans sa grande sagesse, essaie de nous aider ; les cas de stérilité sans cause apparente s’accroissent - comme d’ailleurs s’accroissent les orphelins et enfants abandonnés et maltraités ! »
Jacques-Yves Cousteau, citation extraite du livre Le réveil de la conscience de Jacqueline Bousquet et Sylvie Simon, 2003.

« Dans les bidonvilles, j’avais chargé un docteur de prescrire la pilule, afin que les femmes n’aient pas un bébé tous les dix mois. J’avais vu une femme enceinte allaiter deux bébés ; je ne pouvais laisser perdurer cette situation. J’ai envoyé une lettre directe au Pape pour lui expliquer. Je n’ai jamais eu de réponse... »
Sœur Emmanuelle, 2003

La récente publication de mon livre pamphlétaire Faire des enfants tue, éloge de la dénatalité, fit bien des remous et me valut une fatwa catholique des plus détestable. Certaines citations en ont été tirées et sont largement reprises par des analystes bienveillants.
« La surpopulation est un crime contre l’humanité. »
« Faire des enfants nuit gravement à la planète. »
« Si on aime les enfants, il ne faut pas en faire. »
Michel Tarrier, 2008

Eh bien, décroissez maintenant (que le mal est fait) !


Petit retour à la pataphysique transcendantale... !
Ou comment, sur un rêve plombé par un dogme, on a fini par détruire notre maison du quaternaire.

Dieu (qui n’existe pas) aurait dit à Adam et à Eve (qui n’ont pas davantage existés) : « Soyez féconds et multipliez-vous, remplissez la Terre et soumettez-là ; ayez autorité sur les poissons de la mer et sur les oiseaux des cieux, sur tout ce qui est vivant et qui remue sur la Terre.  » (Genèse 1, 28). A partir de ces prémices, le pape Jean Paul II s’engouffrera dans un populationnisme exacerbé dans son discours du 18 mai 1990 à l’Académie pontificale des sciences : « La pression de la population est très souvent citée comme une des causes majeures de la destruction des forêts tropicales. Quoi qu’il en soit, il est essentiel d’établir que l’expansion démographique n’est pas seulement un problème de statistiques ; c’est une question profondément morale. En condamner les pressions, y compris économiques, auxquelles les gens sont soumis, spécialement dans les pays les plus pauvres, pour qu’ils acceptent des programmes de contrôle des naissances, l’Eglise soutient inlassablement la liberté des couples de décider du nombre de leurs enfants selon la loi morale et leur foi religieuse. » Et de surenchérir en 1999, des fois que l’on puisse croire en un anachronique éco-malthusianisme de papauté : « Il semble que ce qui est le plus dangereux pour la création et pour l’homme soit le manque de respect pour les lois de la nature et la disparition du sens de la vie. Comment est-il possible de défendre de façon efficace la nature si l’on justifie les initiatives qui frappent au cœur de la création, qui est l’existence même de l’homme ? Est-il possible de s’opposer à la destruction du monde, si au nom du bien-être et de la commodité, l’on admet l’extermination des enfants à naître, la mort provoquée des personnes âgées et des malades  ». Pas plus de pilule que de préservatif, pas plus d’IVG que d’euthanasie, l’homme doit s’accrocher à la vie en troupeau surnuméraire, à n’importe quel prix. Dans le rébarbatif écosystème vaticanesque, vrai repoussoir du vivant, il n’y a point de corrélation entre la pression démographique et les chocs écologiques. Ce que veut l’Église, autant le dire tout de suite, c’est une Chine de plus de 2 milliards d’habitants souffrant de tous les maux de la Terre.

Le mal est fait, le troupeau humain a plus ou moins obéi, y compris lorsqu’il était mené par la religion communiste, nous avons été féconds, nous avons remplis une Terre désormais exsangue. Maintenant que nous avons tout bousillé, reste à décroître, à reconstruire les écosystèmes ou à suivre les conseils du WWF en cherchant une seconde planète aux mêmes vertus que Gaïa.

Les mesures mondiales d’une politique volontariste qui n’adviendra jamais


Faute d’un recours démocratiquement accepté à la simplicité volontaire, à une économie de frugalité, à un recul des disparités en vue d’un meilleur partage, tous vœux louables mais relevant du plus idéaliste scoutisme qui ne ferait que de nous berner pendant qu’on se marche les uns sur les autres, une attitude de bienveillante dictature verte se devrait d’imposer d’urgence quelques mesures coercitives encore loin de la stérilisation des femmes et de la castration des hommes.
L’idée d’un coïtus interruptus planetarius n’était qu’un mot plaisant que j’avais lancé.
Nous disposons d’une gamme très variée de parades contraceptives disponible pour les deux sexes afin de continuer à jouir sans procréer, sur une planète qui brûle !
En dernier recours curatif, il convient d’exorciser l’IVG, n’en déplaise aux mouvements intégristes qui nous suggèrent qu’il ne faut pas tuer Mozart dans l’œuf et auxquels nous répondons que c’est peut-être seulement Hitler que nous tuons, la musique n’étant pas plus héréditaire que la mégalomanie criminelle !
Mais il n’y aura pas dépopulation sans contraintes.
La sagesse futurible doit nous conduire à inverser les tendances, à proclamer caduques pour nuisibilité les allocations familiales, à les proscrire partout, maintenant et tout de suite.
À l’opposé, il conviendrait de décréter comme crime environnemental la tentative de fonder une famille nombreuse, de grever d’une lourde et progressive amende toute naissance au-delà d’un seul enfant par femme, voire d’assurer des avantages sociaux aux couples ayant renoncé à procréer.
Une certaine honte de ne pas avoir enfanté doit devenir fierté, c’est laisser son égo-conscience au vestiaire et revêtir une éco-conscience.
La revendication d’une Terre-patrie, notion tant espérée des citoyens de la Terre, autoriserait l’abolition des barrières et des frontières, mettrait à bas bien des disparités et c’est une démographie métisse et fortement régulée qui assumerait le destin d’un Homo sapiens enfin devenu raisonnable et « humain ».
Tout handicap à l’adoption s’en trouverait biffé : chaque enfant est mon enfant.
C’est en mettant le Sud dans le Nord que l’écologie humaine cesserait de stagner en son stade alpha qui fait que nous continuons à ressentir plus d’empathie pour l’enfant d’ici que pour celui de là-bas.
La jeunesse vive résultant du trop plein des pays que nous avons sciemment appauvris pourrait ainsi venir rajeunir nos vieilles nations et en qualité de jeunes travailleurs donner un coup de pousse aux caisses de retraite. À moins que nos nations en déconfiture parce que ravagées par la faillite du système en chute libre ne connaissent un chômage exponentiel, entretenu sciemment en proposant à des vieillards de travailler jusqu’à leur mort !
Mais certains conservateurs cruels et kleptocrates invétérés préfèrent peut-être maintenir le racket sur les ex-colonies ravagées et spoliées par nos soins, dits pays en voie de développement, et ne pas baisser la garde à l’endroit de la dette extérieure, insolvable et pour cause, issue de prêts souverains d’états avancés, de la Banque mondiale, du FMI...
Enfin, toutes recherches médicales intentées dans le sens de l’allongement de la durée de la vie serait proscrite et privée de crédits. Il est maintenant question d’une longévité de l’homme et de la femme occidentales qui devrait atteindre 100 et 110 ans ! Où va-t-on ?
La grande question est : par où commencer, et subsidiairement : comment imposer ce nouveau point de vue aux pays émergents. Il faudrait d’abord faire voter cette nouvelle politique démographique et familiale par le Parlement européen, de façon à pouvoir l’appliquer dans tous les pays de l’Union. Au même titre que l’on devra envisager l’ingérence écologique, il faudra instituer l’ingérence démographique. Sachant qu’un Grenelle de la démographie serait aussi absurde que l’est le Grenelle de l’écologie, pour n’avoir qu’une trop exigüe grille d’application géographique, ce sont des organismes rompus à la mondialisation qui devront s’en charger (Unesco, FMI, OMS...). Les pays industrialisés doivent sans plus tarder soutenir les pays pauvres dans le financement d’une politique contraceptive et anti-démographique imposée, car c’est le seul moyen de limiter cette démographie incontrôlée qui gangrène la Terre entière.

Finissons par une bonne nouvelle, tout n’étant pas négatif...


Il s’agit d’une hypofertilité du mâle humain (dégradation de 30 % du sperme) comme conséquences au stress, mais surtout au stockage dans notre physiologie de tous les résidus médicamenteux et autres pesticides que notre bonne société nous fait ingurgiter, si ce n’est respirer. Voilà donc le stérilisateur enfin stérilisé !
Louons donc Monsanto & Co et suggérons aux empoisonneurs patentés le lancement sur le marché d’un biocide extrême que nous nommerons « Toujours plus » et qui aurait la vertu finale de rendre stérile les consommateurs actifs ou passifs, pauvres ou riches, croyants ou athées, de gauche comme de droite, végétariens ou viandards, du Nord au Sud, en long, en large, en travers et dans tous les sens.

Vivre moins nombreux pour que tout le monde puisse tout simplement vivre.


Et acceptons notre nombrilisme, quand on dit enfant de l’amour, c’est davantage de l’amour du couple que de celui du futur terrien dont il s’agit. Une preuve en est que l’accouchement sans douleur pour soulager la maman fut inventé bien avant celui sans violence pour préserver le nouveau-né. Charité bien ordonnée... C’est édifiant.


P.S. : Les quelque cinq heures utiles à rédiger ce texte ont vu la population mondiale passer de 6 776 518 532 (5 novembre 2008, 13h40) à 6 776 565 212 humains (18h58), soit un apport d’effectif de 46 680 personnes (Source : compteur de l’Ined).


Retrouvez ces thèmes dans deux livres de conscience universelle qui ne mâchent pas leurs mots :
2050, Sauve qui peut la Terre, de Michel Tarrier
Ici un coup d’oeil sur la page du livre.

Faire des enfants tue, de Michel Tarrier & Daisy Tarrier
Là un coup d’oeil sur la page du livre.