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La droite des travaux forcés

Publié par seb musset on jeudi 15 septembre 2011

Libellés : esclavagisme et travail, ump


La ritournelle de rentrée des poncifs moisis de l'UMP est le signe extérieur le plus flagrant de l’essoufflement programmatique des hommes du président. 


Face à l'effondrement en mondiovision de leur modèle rêvé (l'ultra-libéralisme émancipateur), ils s'évertuent à nous resservir la même choucroute (à base de de riches qui portent l'économie à bout de bras et de méchants pauvres qui ne font rien que freiner la croissance en rechignant à s'aligner sur les standards sociaux du tiers-monde).


Nous avons donc le droit depuis quelques jours à la redite fatiguée d'une ligne d'action claquemurée dans l'impasse de ses contre-performances crasses. L'UMP rame pour cristalliser du soutien chez ses fidèles, tentant pathétiquement de générer le buzz au moment où, via ses primaires, le PS domine la danse des médias :


- Guéant stigmatise les roumains et annonce la publication d'un arrêté anti-mendicité sur les Champs-Elysées. « L’image des Champs-Elysées est en jeu ». Étrangement, qu'il n’y ait aujourd’hui plus un seul particulier parisien pouvant se permettre d'habiter sur cette tranchée de deux kilomètres au coeur de la capitale ne le gêne pas. 


- Le président promet de nouvelles places de prison. Insalubrité et surpopulation carcérale sont signalées depuis des années : pourquoi notre président s'en soucie maintenant ? Veut-il s’attirer le vote des prisonniers ? J'y crois moyen. Non, nous sommes ici dans le symbolique dur. Demander plus de places de prisons, c'est faire croire par ricochet que la politique sécuritaire des dix dernières années est un succès, quand bien même la Cour des comptes conclut l'inverse. Bien sûr, la question du coût de la promesse n'est pas abordée. On s'en fout : il suffit de dire et non de faire.


Mais surtout...Oldies but goodies.


- Culpabilisation des pauvres et travail forcé sont de retour. A la suite de la chasse à "l'assisté"  esquissée il y a six mois par Laurent Wauquiez, le député UMP Marc-Philippe Daubresse enfonce le clou. Il remet ce jour ses propositions au président pour "renforcer l'accompagnement vers l'emploi des bénéficiaires et optimiser les politiques d'insertion". Le rapport (qui a fuité dans Le Figaro) vise à ramener le coupable de non-travail sur le droit chemin de la société parfaite qui fait triquer l’électorat de droite (constitué de 60% de retraités, de 10% de fils-à-papa et de 30 % de niqués).


 (Une insertion politique bien optimisée.)


MP.Daubresse propose de créer "un contrat unique d'insertion de 7 heures par semaine pour les allocataires du RSA socle en état de travailler, inactifs, qui n'ont pas de perspective d'emploi, ni de contrats aidés". Les allocations seront conditionnées à l’acceptation d'un contrat financé par l'Etat et payé au SMIC. Soit en théorie 56 euros par semaine, youpi, surtout quand tu dois en dépenser 20 d’essence ou 80 pour faire garder ton môme et envoyer au Flunch le cadet car l'UMP lui a supprimé la cantoche. Seulement voilà, Daubresse annonce joyeux au salarié forcé un gain maximum de 130 euros par mois pour 30 heures soit 2 X moins que le SMIC


Résumons.


Le député Daubresse (11146 euros net par mois + 9000 de rab) brandit de la menace en guise d'"insertion", conseille à l’Etat d'ordonner à des gens qui ne trouvent pas de travail (et subissent déjà cette situation) de travailler à moitié prix, et d'en faire cadeau aux employeurs (qui ne les ont pas employés en premier lieu). Question : Qui sont ici les assistés ? 


La piste des tâches évoquées est juste assez vague pour que l'on saisisse qu'elles se substitueront à des affectations de service public ou à des services à la personne (ça parle à l'électeur gériatrique) via l'intermédiaire du privé : la proposition ouvrant un cadre légal (le travail forcé) à tous les abus Medefo-compatibles (le travail forcé à n'importe quel prix puisque c'est forcé).


Daubresse dans sa grande sagacité nous dégaine donc du "travailler plus pour gagner plus" (fallait oser) mais en V2 : "c'est ça où la mort". Conséquences prévisibles de cette extension king-size du stage sous-payé : dumping salarial, consolidation du précariat et augmentation de chômage. 


En plus de fusionner le RSA avec l'ASS et la prime pour l'emploi, notre rapporteur veut également instaurer une carte à puce des déviants du travail passé, présent et à venir (c'est à peine moins nuancé : centraliser les aides sociales afin de fluidifier "les sanctions"). Rappel : sur les 30 à 50 Milliards qui échappaient au trésor en 2007, 70% étaient dûs à la fraude fiscale, 30% à la fraude sociale (à 80% de la part des employeurs). Sur celle-ci, les organismes de prestations sociales ne détectaient au final que 300 millions. Le président de la CNAM précisait en 2010, que l'organisme récupérait 90% de ces sommes. Daubresse chiffre son dispositif à 420 millions. 


(Pour tout contrat d'insertion sera également offert une brochure "Il n'y a pas de fatalité à rester un cancer de la société toute sa vie" ed.Dassault, ainsi qu'un formulaire pour dénoncer les pauvres qui touchent trois balles d'alloc dans son entourage.)


Idéologiquement (c'est son premier intérêt électoral supposé), la recette miracle valide implicitement que les chômeurs le veulent bien (ça resserre les fondamentaux dans une droite divisée). Le chômeur n'est ni un coupable, ni un profiteur, ni même un inactif. Il est d'ailleurs infiniment moins nocif et coûteux au quotidien pour les Français que banksters et autres spéculateurs ainsi que, dans un registre pas si éloigné, le petit monde aisé de la rente tranquille bénéficiant depuis cinq ans, à brassées de dizaines de Milliards d'euros chaque année, de cadeaux fiscaux explosant une dette que les plus faibles sont aujourd'hui sommés de rembourser (et avec de la rigueur d'un côté et des jobs à demi-payé de l'autre, c'est pas gagné). 


Toujours la même chanson : A défaut de taper dans la poche des riches, on fracasse la tête des pauvres. Problème : en plus d'être humainement abject, c'est économiquement débile. 


Bien sûr, le CDD devenant la norme, chaque salarié (même de droite) aura l'occasion de tâter un jour ou l'autre du travail forcé à 4 euros de l'heure. 


Qu'il s'en rappelle au moment de voter.


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