La RdR - La Revue des Ressources
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Un ultimatum  : réduisons-nous avant 2100 !
lundi, 31 octobre 2011
/ Michel Tarrier /

Naturaliste français né à Paris en 1947, Michel R. Tarrier construit très tôt sa vie autour de sa passion pour la nature.

Après s’être initié à l’étude des insectes dès son plus jeune âge dans la région francilienne, conseillé alors par le biologiste Jean Rostand, c’est dans les Alpes du Sud qu’il découvre dès 1965 ses premiers insectes nouveaux pour la science, qu’il commence à publier dans les revues savantes et qu’il devient l’entomologiste atypique et free lance bien connu des milieux initiés. Ses premiers travaux fondés sur la taxinomie évolutive font débat. Il se consacre d’abord à l’étude des coléoptères Carabidae et fut nommé alors « Monsieur Carabes des années 1970 ». Il s’installe en Andalousie en 1985 et se tourne, en homme de terrain invétéré, vers l’étude des papillons. Il passe alors toute l’Espagne au peigne-fin de sa science entomologique. C’est le début des grandes agressions anthropiques à l’égard de la nature et Tarrier s’emploie à utiliser le caractère bio-indicateur de ses papillons pour une veille soucieuse et une défense qu’il voudrait sans faille des habitats, de plus en plus malmenés par la pression anthropique. Écologue autodidacte devenu écologiste par la force des choses, il commence un véritable combat et entre dans l’écologisme actif. Il prospecte alors le Maroc, durant plus de quinze ans, parcourt plus d’un million de kilomètres de routes et de pistes du Rif au Sahara, dresse une cartographie entomologique ainsi qu’une banque de données très conséquente et documentée des écosystèmes de ce pays. Il tente par le biais des médias de participer à l’écologisation du Maroc qui, démographie et développement aidant, atteste un grave déclin de son riche biopatrimoine. Il donne notamment de la voix pour la sauvegarde de la forêt de cèdres et contre le surpâturage.

Persuadé que l’homme moderne va à sa perte en agressant outre-mesure la biosphère, Tarrier se fait essayiste, écrit, publie et communique beaucoup, notamment sur la toile. Ses premiers livres font polémiques parce que, écologiste radical dans l’esprit de Hans Jonas, Arne Naess et James Lovelock, il s’en prend aux monothéismes régnant et à l’anthropocentrisme insolent (selon lui) qu’il estime coupable du manque de respect à l’endroit des paysages et des autres espèces. Sa théorie est qu’en détruisant son milieu, l’humain pratique une politique de la terre brûlée qui va le conduire à un véritable autogénocide.

Ses derniers livres, 2050, Sauve qui peut la Terre et Faire des enfants tue, sortent en 2007 et 2008, publiés par les Éditions du Temps. Le dernier, qui est un éloge à la dénatalité afin de soulager la planète d’une surpopulation que l’auteur évalue comme indésirable, fait scandale en raison de la violence de son ton pamphlétaire. Il n’en continue pas moins ses recherches entomologiques et publie aux Éditions Biotope, Les Papillons de jour du Maroc, un important ouvrage fortement illustré où la bio-indication recommandée est au premier plan. Tout dernièrement, il a fait paraître chez L’Harmattan, Nous, peuple dernier et Dictature verte.

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De toutes les actus qui nous sont parvenues en 2011, il y a fort à parier que la plus sensationnelle et oiseuse à la fois soit celle du cap des 7 milliards d’humains que nous venons de franchir glorieusement. La population mondiale était de 7.000.057.920 personnes le dimanche 30 octobre 2011 à 14 h 27 min et 47 s (heure du pôle nord). Il n’y a plus qu’à continuer comme si de rien n’était…

Comme par enfantement


Certes, ce n’est pas rien puisque nous n’étions que 3 milliards en 1960, c’est-à-dire "hier".
Si l’évènement sonne creux c’est qu’il ne s’agit pas intrinsèquement d’une question de chiffre mais de comportement. Les lanceurs d’alerte les plus lucides arboraient une pareille inquiétude quand nous n’étions que ces 3 milliards, tant les signes évidents d’une Terre nourricière maltraitée plaidaient déjà pour notre trop plein. Quand on se tient mal, on est toujours trop nombreux. Et comme nous n’avons rien changé à nos habitudes, tout au contraire, il est certain que 7 milliards représentent une inquiétante excroissance de la seule et unique espèce invasive qui soit : l’animal humain. Aujourd’hui, une seconde correspond à 5 naissances : une véritable overdose pour notre planète. Décompte fait de la mortalité, les 402.000 naissances quotidiennes induisent environ 232.000 habitants de plus chaque jour sur la planète.

Pendant des milliers d’années, l’homme était une espèce rare dont l’effectif augmentait très lentement. De 65.000 à 5.000 ans avant J.-C., la population mondiale est estimée avoir varié entre 6 et 8 millions d’humains. Depuis l’an 1 de l’ère chrétienne, notre monde est passé de 250 millions à 7 milliards d’habitants. Passée de 100 millions à l’âge du bronze à 200 millions d’individus au Moyen Âge, c’est surtout à partir du XIXe siècle que la démographie montre une forte incidence, notamment induite par les progrès agraires, économiques et sanitaires (auparavant seuls 2 des 6 enfants mis au monde survivaient jusqu’à l’âge de la procréation). En augmentant de 4 milliards, la population planétaire a triplé depuis 1950. Entre 1900 et 2000, notre effectif est passé de 1,65 à 6,06 milliards, le six milliardième Être humain ayant vu le jour à Sarajevo le 12 octobre 1999. Le rythme de croissance de la population mondiale est actuellement de 74 millions d’individus chaque année, certaines expertises proposent même le chiffre de 1.000 millions de naissances par décennie. On s’accorde aujourd’hui à avancer les chiffres semi scientifiques de 80 à 106 milliards d’humains ayant peuplé la Terre au fil de nos 4000 générations.

En guise de rapide survol des populations record, on dénombre : plus de 1,3 milliard de Chinois (avec le bénéfice de la politique volontariste de l’enfant unique appliquée depuis 1979, d’ailleurs reconduite ces jours-ci), presque 1,2 milliards d’Indiens, 230 millions d’Indonésiens, quasiment 200 millions de Brésiliens…

Au niveau des continents, celui asiatique rassemble 4,2 milliards de personnes, suivi par le continent africain qui a doublé sa population depuis seulement 1980 et a franchi le milliard d’habitants en 2009 (l’Afrique subsaharienne, hormis l’Afrique du Sud, atteint un taux de fécondité record avec 7 enfants par femme, 45 % des Africains ont moins de 15 ans et l’Afrique pourrait approcher les 3 milliards d’habitants en 2100, soit presque un Terrien sur trois). L’Amérique latine (y compris les Caraïbes) réunit 594 millions d’habitants, l’Amérique septentrionale 354 millions, l’Europe 733 millions et l’Océanie 360 millions.

Les taux de fertilité les plus bas se rencontrent en Europe où la fécondité moyenne est tombée à 1,6 enfant par femme (2008). On est bien loin des « performances » du Baby Boom (1945-1965) où l’idéologie égoïste et anthropocentrique de la reproduction se voyait stimulée par l’après-guerre. On assiste ainsi à un effondrement des naissances dans les 27 pays de l’Union européenne, lesquelles naissances restent encore mais de justesse plus nombreuses que les décès (léger excèdent de 509.000 naissances en 2009), mais le chiffre pourrait être négatif dans les années à venir. Une certitude : sans le flux migratoire, la population européenne ne pourrait pas se maintenir. Presque toute l’Europe a ainsi pris inconsciemment le chemin de la dénatalité. Avec quelques pays nordiques, la France tente de maintenir le défi de l’idéologie procréatrice avec un indice qui de 2009 à 2010 passe « victorieusement » de 2 à 2,01, c’est du moins ainsi que les médias ont annoncé la performance ! Il ne faut pas grand-chose pour être fier : un boom nataliste de 0,01 enfant ! Pathétique triomphe pour l’Hexagone qui jusqu’en 1795 comptait la troisième population au monde derrière la Chine et l’Inde ! C’est l’Espagne (1,4), l’Allemagne (1,35) et un certain nombre de pays de l’Est qui attestent la fécondité la plus modérée et écologiquement la plus solidaire.

La fertilité des couples européens est partout jugée insuffisante pour assurer le simple remplacement des générations si 2,1 enfants/femme est choisi comme référence d’une croissance zéro. On peut distinguer en Europe deux groupes de pays. Les pays à fécondité faiblement déficitaire et ceux à fécondité fortement déficitaire. Dans le premier groupe se trouvent la Scandinavie (y compris la Finlande), les Îles britanniques (Irlande et Royaume-Uni) le Benelux et la France. Le groupe fortement déficitaire comprend l’Europe centrale (y compris l’Allemagne) et orientale, ainsi que tous les pays méditerranéens de l’UE. L’ensemble de ces pays devrait connaître un crash démographique à moyen terme d’ici 2040, sauf immigration massive.

Dans le reste du monde, le Japon affiche un taux de 1,4 et la Chine à peine davantage avec 1,7. Les États-Unis ont une fertilité de 2,1 enfants par femme, chiffre boosté par le grand nombre d’immigrés (quelque 675.000 visas sont accordés chaque année). L’indice de l’Inde et de l’Égypte est de 2,8, deux pays déjà littéralement minés par la surpopullulation. En Afrique, les taux sont fort dissemblables puisqu’ils vont de 2 enfants par femme dans les pays du Maghreb jusqu’à une fourchette de 7 à 8 en Ouganda, au Mali et au Niger, en passant par une majorité de pays africains où l’indice est de 4 à 6 enfants par femme.

La Chine et l’Inde abritent un tiers de la population mondiale et sont perçus comme les futurs leaders économiques de la planète à l’horizon 2050. En dépit de ses efforts de limitation populationnelle, la Chine supporte une incommensurable dégradation environnementale. La diminution accélérée du territoire forestier et la baisse de fertilité des sols y sont gravement avancées, pertes irréversibles auxquelles s’ajoutent la dangerosité des nouvelles formes de pollutions diverses. Le développement économique du pays le plus peuplé de la planète est donc concomitant à l’effondrement de ses valeurs écosystémiques et à l’érosion de ses ressources naturelles. Par ailleurs, si le dictat de l’enfant unique a tout de même permis d’éviter le pire en matière écologique, il en résulte de fâcheuses conséquences. D’abord sur le sex-ratio puisque, les traditions chinoises privilégiant le sexe masculin, il serait né 38 millions de garçons de plus que de fille depuis 1980 jusqu’à aujourd’hui. Ensuite sur le plan socio-économique puisque la Chine est devenue vieille avant de devenir riche. Il s’agit là d’un vrai et cruel paradoxe qui touchera tous les pays faisant preuve de dénatalité et que l’on peut résumer par une formule : faut-il pérenniser notre humanité sur une planète vivante ou sauver les caisses de retraite ? Les enfants que l’on fait pour subvenir aux vieux feront d’autant plus de vieux qui nécessiteront davantage d’enfants…

Les enfants nés actuellement dans le monde peuvent espérer vivre en moyenne 65 ans, ce qui représente une amélioration de 9 ans par rapport à la fin des années 1960. Mais la disparité est grande et représentative de la fracture Nord-Sud : si dans les pays développés la longévité moyenne peut atteindre 76 ans, elle ne dépasse pas 52 ans sur le continent Africain (guerres, épidémies dont le sida). C’est en Asie que l’espérance de vie a le plus augmentée, passant de 54 (1960) à 69 ans (2007). L’espérance de vie des femmes est partout supérieure, voire nettement supérieure à celle des hommes (84 ans pour les unes et 77 pour les autres en France en 2006).

En 1900, 90 % du 1,6 milliard de Terriens étaient des ruraux. Aujourd’hui, la moitié de la population mondiale vit dans des villes ou des mégapoles et cette concentration urbaine sera de plus de 60 % dès 2030, avec 3 milliards de nouveaux citadins dans les 30 ans à venir. Si New York était la plus grande métropole en 1950, avec 12 millions d’habitants, la relève sera assurée par Tokyo en 2015, avec 36 millions. L’essentiel de l’humanité se verra donc parqué dans des mégalopoles asphyxiantes.

Derrière tous ces chiffres se cache un grave problème : celui du contraste social entre pays riches et pays pauvres. 1,4 milliards de gens survivent avec moins d’un dollar par jour, 900 millions sont sous-alimentés.

Tant de monde pour si peu de ressources ;
tant d’égoïsme et si peu de partage…


« La Terre peut nourrir 30 milliards d’individus s’ils devaient vivre comme les habitants du Bangladesh, et seulement 700 millions s’ils devaient tous vivre comme des Européens. » Le Quid 2001
« Une étude des Nations unies (en 1970 !) pose la question suivante : Étant donné la capacité agricole et industrielle mondiale, le développement technologique et l’exploitation des ressources, combien de personnes pourrait-on faire vivre sur Terre avec le niveau de vie actuel de l’Américain moyen ? La réponse est : 500 millions tout juste. » Arne Næss

Les riches fabriquent des pauvres et la surpopulation détruit la Terre…

Il y a crise écologique lorsque le milieu de vie d’une espèce ou d’une population évolue sur un mode défavorable à sa survie. La surpopulation est un état démographique caractérisé par une insuffisance des ressources disponibles pour durablement assurer la pérennité d’une population ou de sa descendance, sur un habitat territorial (local, régional, national, continental ou planétaire…). Appliquée à l’humanité, la notion de surpopulation est évidemment relative. En effet, comme l’ont noté Thomas Malthus, ou Karl Marx (chapitre XXV du Livre I du Capital intitulé « La loi générale de l’accumulation capitaliste »), son seuil dépend de la consommation individuelle et collective de ressources qui ne sont pas, qui sont peu, difficilement, lentement ou coûteusement renouvelables. Il dépend aussi de l’accès (plus ou moins équitablement partagé) à ces ressources. Mais selon Claude Lévi-Strauss : « La surpopulation est le problème fondamental de l’avenir de l’humanité », avis auquel se sont rangés d’innombrables auteurs concernés, comme par exemple le Commandant Cousteau : « Nous périrons sous les berceaux. Nous sommes le Cancer de la Terre ; la pullulation de l’espèce humaine est responsable d’une pollution ingérable par la nature. Cela est tellement évident qu’on se demande de quel aveuglement sont frappés nos dirigeants ».

Dans son rapport 2009 du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), l’ONU lança un appel dénataliste pour attirer l’attention internationale sur le fait que la natalité galopante des pays en développement était l’un des principaux moteurs du réchauffement climatique et l’un de ses premiers risques. À mon avis et sur la lancée, il eût été plus séant d’assimiler à de pareilles recommandations les pays occidentaux les plus pollueurs en les incitant tout autant à limiter leurs naissances, à un niveau encore plus drastique, sachant qu’un enfant nord-américain ou européen (et l’adulte qu’il sera) est quinze ou vingt fois plus pollueur qu’un enfant nigérien ou iranien.

Il faut d’urgence aider les femmes à faire moins d’enfants pour lutter contre le péril climatique, tel était le message martelé. La recommandation d’une limitation des naissances comme remède au réchauffement du climat intervenait juste avant un Sommet de Copenhague qui nous était alors présenté comme un ultimatum incontournable, mais dont le cuisant échec ne fit finalement ni chaud ni froid à personne ! Le ton de l’appel onusien n’avait surpris que les démographes les plus compromis dans le capitalisme et le socialisme industrialiste à tout crin, ceux qui pensent qu’un sempiternel développement est possible sur une planète finie, ou qu’il suffirait de le baptiser « durable » pour qu’il le soit, et que si la Terre s’alourdit chaque semaine de plus de 1,5 million d’habitants, la population mondiale va, par on ne sait quel miracle, se stabiliser en douceur à plus ou moins 9 milliards en 2050, et que la bombe démographique annoncée dans les années 1960 a déjà fait pschitt. Le mode de vie qui sert d’exemple n’est pas universaliste, c’est celui occidental. Son développement est évalué sur le PIB : plus on détruit, plus on gagne. N’oublions pas que nous sommes les inventeurs de la destruction.

Quand un démographe n’est pas seulement comptable mais qu’il est enrichi par un tant soit peu d’écosophie, ses cheveux doivent déjà se dresser sur sa tête à la lecture des chiffres 7 ou de 9 milliards, sachant que les 3 milliards des années 1960 posaient déjà problème. Une preuve en est que le Fonds des Nations unies pour la population explique que la croissance démographique dans le monde est à l’origine de 40 à 60 % des émissions de gaz à effet de serre depuis 1820. Et en 1820 nous n’étions guère davantage qu’un milliard de terriens, mais déjà pollueurs et embarrassants, faut-il croire. L’étude connue des carottes de glaces extraites de l’Antarctique et du Groenland attestent que l’augmentation de ces gaz à effet de serre a même commencé il y a presque deux siècles, mais qu’elle s’avère de plus en plus rapide depuis quelques décennies, suivie par un accroissement de la température terrestre moyenne. Une meilleure gouvernance mondiale de la planification familiale, des soins de santé reproductive et des relations entre les sexes pourraient donc avoir d’autant plus d’influence sur l’évolution du climat maintenant que nous sommes 7 milliards, qu’on ne va pas s’arrêter là et que notre humanité doit s’adapter à une hausse progressive du niveau des mers, à des tempêtes de plus en plus violentes et à des sécheresses de plus en plus prégnantes, ainsi qu’au dramatique déclin des ressources sur lesquels nous dormons sur nos deux oreilles, notamment à la raréfaction des énergies fossiles dont nous dépendons, agriculture comprise, à 100 %. L’ONU a insisté sur les femmes qui ont un rôle primordial à jouer, non seulement pour le contrôle des naissances, mais aussi parce qu’elles gèrent les ménages et que leur prééminence est immense dans la production alimentaire des pays en développement. « Il n’y a pas d’investissement dans le développement qui coûte si peu et qui apporte des bénéfices si immenses et de si vaste portée », plaidait Thoraya Ahmed Obaid, la directrice exécutive du FNUAP.

Le jour de la honte


La Terre : le seul organisme qui fasse crédit sans exiger la moindre garantie. Quelle bienveillante assurance-vie ! Et la Terre, c’est vraiment un « organisme ». Aveuglée par un humanisme contre-productif, source d’irrespect écologique et d’un infini gaspillage, l’humanité vit à crédit et consomme annuellement une planète et demie, soit nettement plus que ce que la Terre est en capacité de lui offrir. Selon Global Footprint Network, le jour du dépassement global, ou jour de la dette écologique (Earth Overshoot Day), avance irrévocablement chaque année. En 1987, nous vivions à crédit dès le 17 décembre, en 2007 dès le 26 octobre, en 2010 le 21 août, en 2011 le 27 septembre ! Ce jour fatidique du dépassement est la date dans l’année où, théoriquement, les ressources renouvelables de la planète pour la dite année auraient été consommées. Au-delà, l’humanité puise dans les réserves naturelles planétaires d’une façon non réversible, si bien qu’à terme la raréfaction des ressources condamnera l’humanité à un incontournable rationnement. Son calcul s’effectue comme suit : (Somme de la capacité de production biologique de la Terre / Empreinte écologique) x 365.

Selon l’OPT (Optimum Population Trust), donnée souvent reprise par le député écologiste français Yves Cochet, les couples qui ont 3 enfants, au lieu de 2, augmentent leurs émissions de dioxyde de carbone (CO2) d’une quantité équivalente à celle émise par 620 vols aller-retour entre l’Europe et l’Amérique. La Terre pourrait supporter les 9 milliards d’habitants que nous devrions être en 2050, mais à la stricte condition qu’il ne s’agisse que de paysans ne demandant que leur nourriture. La planète ne pourra offrir à 9 milliards d’humains les possibilités de pouvoir prendre l’avion, de manger des fraises en hiver ou des mangues en Scandinavie, d’entretenir piscines et terrains de golf, et encore moins de rouler dans des voitures, surtout électriques ! « S’il y a déjà des hommes de trop sur cette Terre, ces hommes de trop sont ceux qui se montrent exigeants, autrement dit ce sont des gens de l’Occident », avait déclaré le généticien et humaniste Albert Jacquard.

Le nombril du monde


Si la procréation peut être bien ressentie vue de l’intérieur d’une famille, ses effets excessifs constituent à n’en point douter l’une des principales menaces qui accable l’humanité. Pour les plus démunis, elle est synonyme d’un surplus de misère, tant matérielle que psychologique ; pour les mieux nantis, d’un surcroît de pollution comme de renchérissement de l’espace disponible ; pour la collectivité, d’une encombrante promiscuité et d’une compétition accrue, ici pour survivre coûte que coûte, là pour gravir les privilèges de la pyramide sociale. La reproduction est un phénomène naturel à toutes les espèces, et notamment chez celles opportunistes qui doivent dominer leur habitat. Cela existe chez les rats, les cafards, les mouches ou les papillons. L’homme, dont l’instinct est fondu à la conscience, primate calculateur par excellence, a conceptualisé cette tendance naturelle afin d’en tirer la meilleure stratégie pour un avenir tribal, familial, nombriliste, longévif, celle qui consiste à assurer sa descendance, et par là même la sécurité de ses vieux jours. Avant les progrès du XXe siècle en matière d’hygiène et de prophylaxie des maladies infectieuses, la mortalité infantile justifiait une surfécondation, par ailleurs toujours soutenue par les pouvoirs séculiers inspirés des religions dogmatiques dont le Livre assure que le destin des progénitures sera placé sous les auspices de Dieu. Puis les pandémies, les famines ou les massacres belliqueux étaient là pour écrémer l’excédent populationnel. Et chaque fois, de nouvelles velléités procréatrices portaient les gens à refaire des petits à la louche. Et puis, il fallait des soldats pour défendre les valeurs subjectives des uns contre les autres, des autres contre les uns. Dorénavant, si nous ne sommes pas encore délivrés de nos emprises religieuses, de nos tabous, devoirs imposés et autres vieux démons, nous savons néanmoins contrôler nos naissances. Les hauts risques d’une multitude de la fourmilière humaine peuvent ainsi cautionner l’éventuel dommage d’ « assassiner Mozart » (ou Hitler !) pour reprendre un déjà vieux slogan tout aussi déplaisant que réactionnaire qui militait contre l’interruption volontaire de grossesse. Les cinq ou six dernières décennies ont vu le triplement de la population humaine, ainsi répartie : de 1,4 à 4,2 milliards pour celui asiatique, de 220 millions en 1950 à plus d’un milliard actuellement pour le continent africain, de 330 à 950 millions pour le continent américain et de 400 à 733 millions enfin pour l’Europe. Les chiffres sont partout délirants, sauf pour l’Europe qui n’a enflé que d’à peine 50%.

Si vous estimez que nous n’avons aucune responsabilité, ni vis-à-vis des 11 millions d’enfants qui meurent chaque année avant d’atteindre leur cinquième anniversaire, ni à l’endroit des espèces végétales et animales dont nous usurpons les niches écologiques et qui disparaissent à la vitesse grand V, que notre reproduction n’est pas excessive ou en tout cas acquittée de telles accusations, alors oui, faites encore et encore des enfants. Mais faites vite !

Pour quelques milliards de plus...


2050, 2100, 2300 : sauf décroissance à un taux inespéré, voire implosion utopique résultant d’un hiver démographique et d’un soudain gel des naissances, 9, 17, 36 milliards sont les chiffres effarants annoncés. Le scénario le moins favorable et le plus plausible annonce une humanité qui reste fortement diversifiée dans ses comportements, avec des clivages économiques et culturels très forts induisant des disparités davantage prononcées. Jusqu’où saurons-nous aller trop loin, générer la cohorte jusqu’à l’asphyxie ? Quel serait le point de non-retour de cette hallucinante fabrique de vies ratées, malheureuses, inutiles ?
La population humaine continue de croître mais à un rythme plus tempéré. Cette incidence en baisse n’est rien compte tenu de l’excroissance populationnelle acquise. Un retour à une charge compatible semble quasiment impossible sans une politique mondiale volontariste. La modération observée est le fait des pays riches industrialisés où le renouvellement générationnel n’est plus assuré, exception faite des États-Unis où les populations immigrées se chargent d’entretenir une incidence démographique en hausse. L’ONU prévoit une telle baisse démographique en Allemagne, en Italie, au Japon, en Russie et dans la plupart des États issus de l’éclatement de l’ancienne Union soviétique. Mortalité basse et fécondité extrêmement basse, dans ces conditions, la population de ce groupe de pays, d’actuellement 1,2 milliard de personnes, ne devrait pas augmenter d’ici à 2050. Une démotivation aux valeurs de la fécondité, une famille éclatée de plus en plus réduite au couple quand ce n’est pas à un seul parent, une infertilité masculine croissante et une planification des naissances majoritairement adoptée sont quelques-uns des facteurs limitants. Une autre cause de cette accalmie mondiale est la propagation du sida, pandémie qui réduit le taux de longévité dans des proportions considérables, comme en Afrique australe où l’espérance de vie a chuté de 62 ans dans les années 1995 à seulement 48 ans pour la période 2000-2005.

Ironie du sort ou instinct de survie contreproductif, la densité humaine sera beaucoup plus élevée dans les pays pauvres qui éprouvent déjà les pires difficultés à assurer la sécurité alimentaire de leurs ressortissants. Dans ces contrées, le contrôle de la natalité est pratiquement inexistant et les familles de cinq à huit enfants sont la norme. Au Burkina Faso, au Congo Brazzaville, au Burundi et en République démocratique du Congo, en Guinée-Bissau, au Timor Oriental, au Liberia, en Ouganda, au Mali, au Niger et au Tchad, tout comme en Afghanistan, les populations vont tripler avant le terme de ce demi-siècle.
La courbe générale est peut-être à un ralentissement de la croissance démographique et à une lente stabilisation de la population globale, en comparaison aux vives progressions des 50 dernières années. En dépit de ce répit, 2050 verra tout de même un effectif minimum de 9 milliards de terriens, notamment fourni par la Chine et l’Inde. À la même période, cette dernière nation surpassera la Chine et sera en tête de liste des pays les plus peuplés. La moitié des humains habiteront alors l’Inde et la Chine.

L’an 2300 : quand nous serons 36 milliards, ou
ne serons plus


Un rapport de démographie fiction récemment produit par l’ONU s’intitule éloquemment : La population mondiale entre explosion et implosion. Cette projection de la démographie mondiale pour 2300 sert d’outil pédagogique permettant aux terriens d’entrevoir vers quel type de mur ils se dirigent et de prendre conscience, dès maintenant, de la responsabilité de fertiliser ou non. La population globale continuerait à amplifier modestement jusqu’en 2075, avant de se stabiliser, ou bien d’exploser ou d’imploser, selon que la fécondité se maintient supérieure au niveau de remplacement des générations ou reste durablement inférieure. L’explosion (à 36,4 milliards d’habitants en 2300) ou l’implosion (à 2,3 milliards) apparaissent comme des scénarios catastrophes.

Selon les démographes, la situation est grave… mais pas désespérée ! Pourtant, la survie de l’humanité dépend du possible, et non de l’impossible. La Terre – qui était plate – n’est ni extensible, ni rechargeable. Combien nous faudra-t-il de planètes si nous continuons ainsi à nous reproduire ?

« Celui qui croit qu’une croissance exponentielle peut continuer indéfiniment dans un monde fini est un fou, ou un économiste ». Kenneth Boulding
« Celui qui croit qu’une démographie exponentielle peut continuer indéfiniment dans un monde fini est un fou, ou un démographe ». Michel Tarrier

Stop, ou encore ?


Innombrables sont les indicateurs qui nous alarment d’une surchauffe de la planète, d’un épuisement gravissime d’une Terre suroccupée et surexploitée : bouleversement global du climat, mort biologique des sols suite aux abus d’usages productivistes et courtermistes, pollutions sans cesses plus irréversibles, recul effarant des autres espèces dont nous occupons indûment les niches, déclin d’une biodiversité pourtant salutaire à l’humanité, déforestation sur tous les continents, épuisement des mers et des océans, tarissement de toutes les ressources dont la grande majorité n’est pas renouvelable…, la liste procure le vertige, la nausée. Ce sont les signes avant-coureurs d’un effondrement que l’establishment ne peut avouer sous peine d’un chaos économique et boursier. Nous sommes entrés dans la sixième phase d’extinction massive d’espèces, la première pour cause anthropique. Un seul chiffre, lequel concerne un cousin, voire un frère : il reste 5000 orangs-outans pour 7 milliards d’Homo sapiens. En effaçant les Grands singes, nous effaçons notre passé.

Reculer pour mieux sauter, la méthode est vieille comme le monde et pouvait prévaloir quand le monde était jeune. Nous avons tant l’habitude de jouer avec le feu que cette politique de la terre brûlée est un symptôme chronique, presque familier. Stratégiquement, cette tactique de la terre brûlée est une solution de la dernière chance qui consiste à avancer en détruisant tout derrière soi, afin de ne donner aucune chance de ravitaillement à l’ennemi. Comble du crétinisme, notre ennemi n’est que nous-mêmes et outre un écocide déjà perpétré, nous signerons un autogénocide avant la fin de ce siècle. Qu’on le veuille ou non, nous sommes entrés dans un millénaire qui n’aura qu’un siècle.
La vie devant soi est devenue un gros souci.

Sommes-nous si ingrats que nous faisons des enfants alors que notre monde est en mauvais état et que l’avenir pose problème ? Il est dorénavant moins préjudiciable pour la planète d’avoir un chat ou un chien qu’un enfant !

Réduisons-nous de toute urgence !


Source du logo : Femina.ch les femmes font la grève du ventre


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