SOPA, PIPA, et la crainte d'un filtrage du Web à grande échelle
Le Monde.fr | 18.01.2012 à 13h31 • Mis à jour le 18.01.2012 à 19h06
La version anglophone de Wikipedia sera fermée pendant vingt-quatre heures, mercredi 18 janvier. Après un débat interne, l'encyclopédie participative a estimé qu'il était nécessaire de montrer fortement son désaccord avec le projet de Stop Online Piracy Act (SOPA), qui prévoit des mesures de lutte contre le téléchargement illégal jugées trop arbitraires, notamment le blocage de sites sans procédure judiciaire.
· Que prévoient ces textes ?
Pour enrayer le téléchargement illégal, trois mesures ont été élaborées. PIPA ("Protect Intellectual Property Act", l'équivalent de SOPA au Sénat) et SOPA permettait le blocage DNS (un blocage au niveau fondamental d'Internet, qui consiste à empêcher un navigateur Internet de "trouver" une page Web) des sites reconnus comme portant atteinte aux lois américaines sur le droit d'auteur. Cette disposition était valable y compris sur les sites étrangers.
Les textes initiaux prévoyaient aussi un déréférencement de ces sites dans les moteurs de recherche. Un volet économique permettait aussi de geler les comptes de ces sites, notamment des services de paiement électronique de type PayPal.
· Quelles conséquences concrètes ?
Des sites utilisés quotidiennement, notamment ceux proposant des contenus générés par les utilisateurs, pourraient théoriquement être bloqués, prévient le site Americancensorship. Mais également certains liens cliquables pourraient être bloqués dans les courriels ou sur les réseaux sociaux.
· A quel stade se trouvent les projets de loi antipiratage ?
Le projet de loi SOPA a été introduit à la Chambre des représentants, à la fin du mois d'octobre, par Lamar Smith, représentant du Texas. Le projet est à la fois soutenu par des représentants républicains, et démocrates. PIPA a été déposé plus tôt au Sénat, en mai, par le démocrate Patrick Leahy. La commission juridique de la Chambre des représentants a par ailleurs indiqué que les débats sur SOPA reprendront en février.
· Comment le texte a-t-il évolué ?
Le blocage DNS, l'un des points cruciaux des projets, a été remis en cause, y compris parmi les promoteurs de PIPA et SOPA. Patrick Leahy souhaite désormais introduire un amendement sur le sujet, Lamar Smith a pour sa part demandé plus de temps pour examiner la faisabilité de ces blocages.
· Si le blocage DNS est abandonné, les textes perdent-ils de leur substance ?
Pour les associations de protection de la vie privée en ligne, comme l'Electronic Frontier Foundation, SOPA et PIPA portent atteinte à la liberté d'expression. Est dénoncée par ailleurs une disposition du texte, qui menace de sanctions les sites qui fourniraient des outils pour contourner la loi.
· Qui s'oppose au projet ?
Mi-janvier, la Maison Blanche s'est désolidarisée des projets de loi examinés par le Congrès. "Nous considérons que le piratage sur Internet est un grave problème qui nécessite une réponse législative sérieuse, mais nous ne soutiendrons pas une législation qui réduit la liberté d'expression, augmente les risques pour la sécurité cybernétique et sape le dynamisme et le caractère innovant de l'Internet mondial", a-t-elle dit dans un communiqué.
En novembre, plusieurs acteurs du Web, incluant notamment Google, Facebook, et eBay, avaient signé, mi-novembre, une lettre ouverte, parue dans le New York Times, critiquant les mesures portées par les projets de loi SOPA et PIPA. Twitter a également signé cette lettre, mais n'a pas souhaité participer au "blackout", prôné par Wikipédia. Le site sopastrike recense tous les sites qui s'opposent au projet.
· Qui sont les soutiens du projet antipiratage ?
La liste des soutiens à PIPA et SOPA s'est réduite. Les grandes maisons de disques et les studios hollywoodiens soutiennent ces projets. D'autres acteurs importants, comme Goddady, spécialisé dans l'achat de noms de domaine, a fait volte-face après une brève mais intense campagne de boycott.
Le soutien de l'industrie du jeu vidéo fait aussi débat. Si Nintendo et Sony par exemple ont annoncé qu'elle ne soutenaient plus SOPA, l'Entertainment software association (ESA), qui regroupe les principaux acteurs du jeu aux Etats-Unis, continue de le faire.
Collé à partir de <http://www.lemonde.fr/technologies/article/2012/01/18/sopa-pipa-et-la-crainte-d-un-filtrage-du-web-a-grande-echelle_1631095_651865.html>