"Aussi dangereux ailleurs" : dans le meurtre de Philippine, Sandrine Rousseau ne voit pas de problème avec les OQTF
Par François Darras
26/09/2024à 17:15
Si vous pensez qu'un criminel sous OQTF ne doit pas rester en France, vous n'êtes pas vraiment féministe, ou en tout cas pas solidaire des femmes marocaines qui pourraient subir ses sévices. C'était peu ou prou le propos de Sandrine Rousseau, ce jeudi 26 septembre, au micro de France Inter, qui s'inquiète surtout de la récupération par l'extrême droite…
Il était sous obligation de quitter le territoire français, libéré en fin de peine en juin 2024, placé en centre de rétention puis remis en liberté le 3 septembre et assigné à résidence. Et il est suspecté d'être le meurtrier de Philippine, une jeune femme de 19 ans, dont le corps a été retrouvé samedi 21 septembre dans le bois de Boulogne, à Paris. C'est pour ces faits qu'il a été interpellé mardi 24 septembre à Genève. La députée écologiste Sandrine Rousseau, interviewée, ce jeudi 26 septembre matin, au micro de France Inter a été questionnée notamment à ce propos. Et visiblement la première crainte de la parlementaire élue à Paris, c'est la récupération du drame par l'extrême droite.
Lutte anti-récupération
Invitée de Sonia Devillers, l’écologiste a commencé par expliquer son tweet, dédié à ce sujet, ayant fait polémique mardi 24 septembre. Elle y déclare que « ce féminicide mérite d’être jugé et puni sévèrement » et que « l’extrême droite va tenter d’en profiter pour répandre sa haine raciste et xénophobe ». La journaliste du service public cite alors son tweet et l’interroge pour savoir si sa toute première préoccupation est bien celle-là, quand une jeune femme est assassinée. Sandrine Rousseau dément : « Non, c’est pour ça que j’ai commencé en disant que c’était un féminicide et qu’il fallait le punir sévèrement, mais je suis inquiète du fait que l’extrême droite utilise quelques faits divers comme ça et en fasse un sujet de société. »
Pour la députée réélue, le sujet n’est pas non plus l’OQTF, qui ne changerait au final rien à l’affaire, même si l’homme en question, déjà condamné pour viol, devait donc retourner au Maroc : « Je m’inquiète quand même du fait que nous n’ayons aucune espèce de considération sur le fait que ce type est dangereux, manifestement, puisqu’il a tué Philippine, et que s’il était dans un autre pays il [serait] tout aussi dangereux et mettrait en danger d’autres femmes, donc en fait la question c’est pas tant l’OQTF. »
Une conception bien particulière du droit – et en passant du féminisme – qu'on mettra donc sur le coup de l'internationalisme. Si un homme étranger tue une femme en France, il aurait pu le faire ailleurs, on sera donc prié de ne pas s'alarmer de la non-exécution de l'OQTF. C.Q.F.D. Souhaiter son départ, c'est un petit peu vouloir du mal aux femmes marocaines ? Un argument sans doute difficilement entendable pour les proches des victimes tuées par un homme que l’administration voulait voir quitter le territoire en raison de sa dangerosité…
Ouvrir des prisons ?
Mais l’ancienne universitaire continue : « Là il y a quelques mois on a arrêté en France un des dix plus grands pédocriminels du monde, il s’appelait Mathieu il était proche de Bordeaux, pour autant ça n’a pas du tout ému l’extrême droite. Le procès de Mazan n’émeut pas l’extrême droite [non plus, N.D.L.R.]. Donc en fait la question des femmes se résout à dire et à porter le message que les femmes sont en danger à cause des immigrés, à cause des personnes sous OQTF, ce qui n’est pas vrai. » Si l’on part de ce principe, puisque les menaces sont légion autour des femmes, il serait vain de viser à réduire le péril en éloignant des personnes qui doivent l’être. C’est une certaine idée de la souveraineté, et de la lutte pour la sûreté des citoyens…
Certes, comme Sandrine Rousseau le souligne à juste titre, dans neuf cas de violences sexistes et sexuelles sur dix, l’agresseur est un membre de l’entourage de la victime. Pour autant, le tableau d'ensemble doit-il noyer, et même invisibiliser ces cas par ailleurs minoritaires ? En tout cas, si on en doutait, la lutte contre la non-exécution des obligations de quitter le territoire français est loin d’être une priorité pour Sandrine Rousseau.
Collé à partir de <https://www.marianne.net/societe/police-et-justice/aussi-dangereux-ailleurs-dans-le-meurtre-de-philippine-sandrine-rousseau-ne-voit-pas-de-probleme-avec-les-oqtf>