"C'est devenu infernal" : à Montmartre, habitants et commerçants excédés par le surtourisme
Mont Saint-Michel, Cannes, Annecy, Calanques de Marseille, de nombreux lieux touristiques débordent de visiteurs. A Montmartre, associations d'habitants et commerçants s'organisent face à ce surtourisme.
La Maison Rose à Montmartre, restaurant célèbre pour son apparition dans la série "Emily in Paris"
Crédit : Gautier Delhon-Bugard
RTL Événement du 24 juillet 2025
Ce dimanche 27 juillet, la butte de Montmartre s'invite au Tour de France. Cependant, avant même l'arrivée du peloton, les rues débordent de touristes. Tout comme Cannes, Annecy ou encore Marseille, ce quartier du XVIIIᵉ arrondissement est touché par le surtourisme. L'an dernier, 11 millions de personnes sont entrées dans le Sacré-Cœur.
Montmartre a parfois des airs de Disneyland avec son afflux de touristes. Les riverains, eux, sont excédés de voir leurs rues remplies. Devant l'enseigne vintage du métro, une poignée de touristes asiatiques brandissent leur téléphone. À quelques mètres de là, un guide espagnol raconte l'histoire de ce mur sur lequel il est écrit "Je t'aime" en 250 langues.
Des Barcelonaises tentent désespérément de se frayer un chemin, espérant un selfie. "On fait un tour de Montmartre avec notre guide et il nous a amenés ici pour voir ce mur. Il nous apprend son histoire. Le quartier est magnifique, mais c'est important d'être guidé pour comprendre", expliquent-elles.
Agacement des riverains
Les hordes de touristes se mêlent aux sidecar, aux 2 CV et aux cinq petits trains du quartier
. Un immense attroupement se forme dès midi devant une maison rose aux volets verts. Ce restaurant est devenu célèbre grâce à son apparition dans la série Emily in Paris, l'histoire d'une américaine qui vit en France. Ashley, une américaine originaire du Colorado, a vu le bâtiment sur Instagram "le rose est ma couleur préférée, c'est ce qui m'a attirée".
Cependant, l'ébahissement des touristes ne ravit pas les habitants du quartier. Devant la statue du buste de Dalida, un homme habillé tout en blanc se désole de ce spectacle. "Les touristes se sentent les rois du lieu. Ils considèrent qu'ils sont à Disneyland", déclare Olivier Baroin. Expert en bijoux anciens, il vit ici depuis 15 ans. "Ici c'est la place Dalida, le petit monsieur avec son parapluie, va leur faire un speech sur Dalida, qui habitait à côté du Moulin de la Galette. Ils vont tous s'amuser les uns derrière les autres à lui caresser la poitrine et à faire une photo", explique-t-il. La situation est décrite comme intenable, notamment à cause des très bruyants hauts parleurs utilisés par les guides. D'après Olivier, "le mois prochain ce sera littéralement infernal".
Des conséquences quotidiennes
Béatrice Dunner préside l'association de défense de Montmartre et du XVIIIᵉ arrondissement. Elle habite une rue entre le funiculaire et la station de métro des Abbesses. D'après elle, "certains jours, notamment pendant les week-ends, mais aussi durant tout l'été, il faut que vous obligiez quelqu'un à s'arrêter pour sortir de chez vous". Dans les divers commerces de proximité, elle se plaint du temps d'attente dans les boulangeries, avec les touristes "qui achètent, photographient, beaucoup, des sandwiches et des pâtisseries françaises". Tout comme Olivier, elle se plaint des nuisances sonores, qu'elle qualifie de " considérables" jour et nuit.
La disparition de nombreuses enseignes
Vincent tient un salon de coiffure depuis 37 ans à Montmartre. À travers les années, il a vu des enseignes disparaitre, se faire remplacer. Un salon de coiffure est devenu un coffee shop, avec du matcha et des gâteaux. Un café est devenu un broc à succès, qui cause une énorme file d'attente chaque weekend. Selon Vincent, " Ça occupe tout le trottoir, même les riverains en face ne peuvent même pas rentrer chez eux".
En 10 ans, le nombre de meublés touristiques a explosé et le prix de l'immobilier s'est envolé entre 12.000 et 15.000 euros du mètre carré. Les moins fortunés ont donc déserté, au profit des touristes qui défilent dans les appartements.
Comment lutter contre cette grande foule ?
"Les autorités ne sont pas au niveau", disent les associations de quartier. La mairie de Paris a décidé de piétonniser Montmartre, ce qui donne plus de place aux touristes, selon les riverains. La plupart vantent le modèle d'Amsterdam, qui a limité la location des Airbnb à 30 jours par an. Le conseil municipal vient aussi d'interdire la construction de nouveaux hôtels.
Selon Béatrice Dunner, "il y a un plafond au nombre de vols qui se posent dans l'aéroport d'Amsterdam par jour. En France, c'est tout le contraire. Et puis on met en valeur Montmartre pour faire venir du monde". Très dubitative par rapport à l'épreuve de cyclisme de ce dimanche, d'après elle, "ça va ajouter de l'eau au moulin".
La ville de Paris réunit régulièrement les maires d'arrondissement sur le sujet. Selon un communiqué, l'objectif est de réduire la pression sur certains sites emblématiques et de promouvoir des quartiers moins fréquentés.
Collé à partir de <https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/c-est-litteralement-infernal-a-montmartre-habitants-et-commercants-face-au-surtourisme-intenable-7900525587>